Système de fonctions itérées

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Attracteur de deux similitudes et .


En mathématiques, un système de fonctions itérées (SFI ou encore IFS, acronyme du terme anglais Iterated Function System) est un outil pour construire des fractales. Plus précisément, l'attracteur d'un système de fonctions itérées est une forme fractale autosimilaire faite de la réunion de copies d'elle-même, chaque copie étant obtenue en transformant l'une d'elles par une fonction du système[1].

La théorie a été formulée lors d'un séjour à l'université de Princeton par John Hutchinson en 1980[2]. Michael Barnsley a démontré, avec le théorème du collage, que tout ensemble compact de points peut être approximé d'un SFI.

Définition[modifier | modifier le code]

Un SFI est une famille S de N fonctions contractantes dans un espace métrique complet M[3],[4].

On définit à partir des Ti une nouvelle fonction T, elle aussi contractante sur , l'ensemble des parties compactes de M muni de la distance de Hausdorff, par l'expression , appelée opérateur de Hutchinson de S[2].

est un espace métrique complet[5].

Le théorème du point fixe de Banach assure l'existence et l'unicité d'un sous-ensemble F de M fixe par T.

F est appelé attracteur du SFI et noté |S|.

Remarques
  • En pratique, on choisit un compact quelconque K, par exemple un point, et on considère la suite (K, T(K), T(T(K)), ...), autrement dit l'orbite de K[6]. Il est remarquable que cette suite converge alors, pour n'importe quel compact K, vers |S|. C'est de là que vient le terme d'itéré[7].
  • La plupart des fonctions des SFI classiques sont des fonctions affines[8],[9],[7].
  • On appelle flammes fractales des fractales obtenues par des fonctions non linéaires[10].
Flamme fractale.

Exemple[modifier | modifier le code]

Considérons les deux homothéties définies sur par . Les deux ont pour rapport . La première a pour centre et la deuxième . , l'ensemble triadique de Cantor vérifie alors . La famille de contractions est ici et en est l'attracteur[11],[12].

Caractère d’auto similarité[modifier | modifier le code]

En reprenant les notations précédentes, il doit être précisé que l'on applique le théorème du point fixe dans l'espace métrique complet K(n) des compacts non vides de n, muni de la distance de Hausdorff. Ainsi, F est lui-même un espace compact non vide de n, c'est-à-dire un fermé borné. Il doit aussi être précisé en quoi F est une fractale. En réécrivant l'égalité T(F) = F, est obtenu : . C'est l'égalité qui traduit l'intuition obtenue en observant bon nombre d'attracteurs de systèmes de fonctions itérées (la courbe de Lévy par exemple, l'ensemble de Cantor, le triangle de Sierpinski[13]...). Le caractère d'autosimilarité est ici parfaitement définissable mathématiquement, et au moins exploitable dans le cadre restreint des attracteurs de systèmes de fonctions itérées. C'est celle choisie par John Hutchinson dès la première page de son article de 1980[2].

Géométrie des attracteurs[modifier | modifier le code]

Soit un attracteur, où les sont injectives, et un compact.

(i) On suppose que . Alors est totalement discontinu.

(ii) On suppose que . Alors est connexe[6].

Par exemple, l'ensemble triadique de Cantor est totalement discontinu.

Dimension de la fractale[modifier | modifier le code]

De la construction du SFI, on peut déduire la dimension de Hausdorff de la fractale finale : si l'application Ti est contractante de rapport ki, et que Ti(|S|) est disjoint de Tj(|S|), pour tous i, jN distincts, alors la dimension de S est le réel d vérifiant :

Une riche source de fractales[modifier | modifier le code]

C'est en ces termes que Michael Barnsley explique l'intérêt du théorème suivant[14] :

Théorème — Soit (Y,d) un espace métrique. Soit X un compact non vide de Y. Soit H(X) l'ensemble des compacts non vides de X. Soit f : XY continue et telle que X soit contenue dans f(X). Alors

  1. pour tout compact non vide B de X, f –1(B) est un compact non vide de X et l'on peut donc définir une application W : H(X) → H(X) par W(B) = f –1(B)
  2. W possède un point fixe A donné par

On a aussi

Exemples
  • Le cas f(z) = z2 fournit le disque unité.
représentation de l'ensemble de Julia (c=-1) avec turtle(python)[15]
  • Le cas f(z) = z2 – 1 fournit l'ensemble de Julia associé, noté[16] J–1. On peut prendre pour X le carré de centre 0 et de côté 4.
  • On a[14], de façon générale, . Autrement dit, A est l'ensemble des points dont l'orbite ne s'échappe pas de X, où l'on appelle[6] orbite d'un point la suite (x, f(x), f2(x), ...).

Exemples d'attracteurs classiques[modifier | modifier le code]

La fougère de Barnsley, élaborée par un système de quatre fonctions affines.

Références[modifier | modifier le code]

  1. « Fractales,points-fixes et coquillages »
  2. a b et c (en) John E. Hutchinson, « Fractals and self similarity », Indiana Univ. Math. J., vol. 30,‎ , p. 713-747 (DOI 10.1512/iumj.1981.30.30055, lire en ligne) (p. 714) : « My special thanks to Frederick J. Almgren for making possible my stay at Princeton university ».
  3. Robert Ferréol, « attracteur d'une famille de contractions », sur mathcurve, (consulté le ).
  4. « afc », sur Tangente (magazine), (consulté le ).
  5. Michael F.Barnsley, Fractals everywhere, Academic Press Professional, (ISBN 0-12-079061-0, 978-0-12-079061-6 et 0-12-079069-6, OCLC 28025975, lire en ligne), p. 35
  6. a b et c Claude Tricot, Géométries et mesures fractales : une introduction, Paris, Ellipses, , 439 p. (ISBN 978-2-7298-4045-7, OCLC 377976458), p. 4, p. 36, p.80.
  7. a et b Florence Messineo, Le monde fascinant des objets fractals, Ellipses (ISBN 978-2-340-00812-0), p. 93.
  8. (en) « Fractal Visualizations ».
  9. « Système itéré de fonctions ».
  10. (en) S. Draves et E. Reckase, « The Fractal Flame Algorithm », .
  11. (en) Gerald A. Edgar, Measure, topology, and fractal geometry, Springer, (ISBN 0-387-74748-6, 978-0-387-74748-4 et 978-0-387-74749-1, OCLC 255688131, lire en ligne), p. 7
  12. K. J. Falconer, Fractal geometry : mathematical foundations and applications, (ISBN 978-1-118-76286-8, 1-118-76286-X et 978-1-118-76285-1, OCLC 855209608, lire en ligne), p. 133
  13. (en) Gerald A. Edgar, Measure, Topology, and Fractal Geometry, Springer, (ISBN 978-1-4419-2569-5, OCLC 255688131), p. 27.
  14. a et b M. F. Barnsley, Fractals Everywhere, Academic Press, (ISBN 0-12-079069-6, OCLC 28025975), p. 268 et 287.
  15. Heinz-Otto Peitgen, Dietmar Saupe et M. F. Barnsley, The Science of fractal images, Springer-Verlag, (ISBN 0-387-96608-0, 978-0-387-96608-3 et 3-540-96608-0, OCLC 17919317, lire en ligne), p. 154
  16. Robert Ferréol, « Ensemble de Julia », sur mathcurve.
  17. Robert Ferréol, « Courbe du blancmanger », sur mathcurve (consulté le ).
  18. Robert Ferréol, « Escalier du diable », sur mathcurve (consulté le ).
  19. Robert Ferréol, « Courbe de Hilbert », sur mathcurve (consulté le ).
  20. Robert Ferréol, « arbre fractal », sur mathcurve (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Article connexe[modifier | modifier le code]

Jeu du chaos, une version simplifiée proposée par Barnsley.

Liens externes[modifier | modifier le code]

Logiciels

  • Apophysis, générateur de fractales supportant des fonctions non linéaires.
  • Glito, programme libre permettant d'explorer les SFI de dimension 2 (applications affines, fonction sinusoïdales, ensemble de Julia).
  • Générateur de SFI en ligne, proposant des systèmes de fonctions itérées classiques, et permettant également de créer des SFI inédits.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

(en) Kenneth Falconer, Fractal Geometry: Mathematical Foundations and Applications, Chichester, John Wiley and Sons, , 288 p. (ISBN 0-471-92287-0), p. 113-117 et 136