Méthode de Tschirnhaus

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La méthode de Tschirnhaus, imaginée et mise au point par Ehrenfried Walther von Tschirnhaus, est une tentative de résoudre le point clé de la théorie des équations à savoir trouver une méthode générale de résolution de l'équation polynomiale. Cette méthode tente de ramener l'équation que l'on veut résoudre à d'autres équations de degré moins élevé. Cette méthode échoue de façon certaine pour les équations de degré supérieur ou égal à cinq qui ont un groupe de Galois non résoluble.

Principe de la méthode[modifier | modifier le code]

Tschirnhaus rappelle d'abord[1] que toute équation de degré n

se ramène classiquement à une équation sans terme de degré n – 1, par un changement de variable de la forme . En effet, le coefficient du terme en du polynôme

est donc il suffit, pour que ce coefficient soit nul, de choisir égal à .

Cela lui donne l'idée, pour annuler plus de termes, d'introduire une inconnue auxiliaire y qui n'est plus une translatée de x mais un polynôme, en posant[1] :

k (strictement inférieur à n) est le nombre de termes à annuler, et le choix des coefficients est expliqué ci-dessous.

Cette transformation se nomme transformation de Tschirnhaus.

En éliminant x entre cette relation et l'équation à résoudre, on obtient une équation de degré n et d'inconnue y dont les coefficients dépendent des k coefficients bi. On tente alors de déterminer les coefficients de façon à obtenir une équation en y plus simple à résoudre, par exemple (pour k = n – 1) de la forme :

.

Pour cela, dans l'équation en y, on pose égaux à 0 tous les coefficients des monômes de degré 1 à n – 1. On obtient ainsi un système de n – 1 équations à n – 1 inconnues . Ces valeurs, une fois obtenues, sont reportées dans l'équation :

,

y prend successivement pour valeur l'une des n racines n-ièmes de c.

Tschirnhaus ramène ainsi (sur l'exemple n = 3) la résolution d'une équation de degré n à celle de n équations de degré n – 1. Cependant[2], sa méthode fournit n(n – 1) valeurs pour x, qu'il faut tester pour détecter, parmi elles, les n solutions effectives. En précisant son idée, on peut trouver directement ces n solutions (une par valeur de y)[3].

La méthode ci-dessus permet à Tschirnhaus de donner, pour les solutions d'une équation cubique, une nouvelle formule, différente de celle de Cardan. Il retrouve aussi cette dernière par un autre changement de variable : xy = y2 + a, réinventant ainsi la substitution de Viète.

Application à la résolution des équations cubiques[modifier | modifier le code]

Considérons une équation de degré 3, sans perte de généralité de la forme

avec . Posons, comme indiqué ci-dessus :

.

Le système

est équivalent[3] au système

qui admet des solutions x si et seulement si[3]

.

Cette condition se réécrit[4] :

.

On détermine a et b[3] de façon qu'elle ne contienne plus de terme en y2 ni en y :

Ce choix de a et b permet de simplifier l'équation , qui devient alors[4],[3] :

.

On termine la résolution[4] en choisissant une racine cubique z de , en posant pour , et en calculant, pour chacune de ces trois valeurs, les deux solutions de l'équation du second degré . On obtient ainsi en général[3] 6 valeurs distinctes, dont les 3 solutions de font nécessairement partie. Il suffit, pour conclure, de tester ces 6 valeurs.

Méthode particulière pour les équations du quatrième degré[modifier | modifier le code]

Considérons une équation de degré 4, sans perte de généralité de la forme

avec . Considérons la transformation de Tschirnhaus suivante :

.

Le système

admet des solutions x si et seulement si[5]

avec

,
,
.

L'équation est bicarrée si

ce qui équivaut à[5]

Pour résoudre , il suffit donc de :

  • trouver une solution a de l'« équation cubique résolvante (en) »  ;
  • calculer A et C pour ce choix de a et pour  ;
  • trouver les quatre solutions () de l'équation bicarrée obtenue ;
  • pour chacune de ces quatre valeurs, trouver les deux solutions () de .

On obtient ainsi 8 valeurs , dont les 4 solutions de font nécessairement partie. Il suffit, pour conclure, de tester ces 8 valeurs[5].

Équation du cinquième degré[modifier | modifier le code]

Voir à ce propos l'article Radical de Bring.

Remarque historique[modifier | modifier le code]

Cette méthode est la première méthode générale de résolution des équations à avoir été publiée. Sa publication remonte à 1683[1].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b et c (la) Tschirnhaus, « Methodus auferendi omnes terminos intermedios ex data aequatione », Acta Eruditorum,‎ , p. 204-207 (lire en ligne). Traduction en anglais : (en) R. F. Green, « A method for removing all intermediate terms from a given equation », ACM SIGSAM Bulletin, vol. 37, no 1,‎ (lire en ligne).
  2. (en) Victor S. Adamchik et David J. Jeffrey, « Polynomial transformations of Tschirnhaus, Bring and Jerrard », ACM SIGSAM Bulletin, vol. 37, no 3,‎ (lire en ligne).
  3. a b c d e et f Ces calculs de Tschirnhaus 1683 sont détaillés, complétés et testés sur un exemple, dans la première partie d'un devoir corrigé sur Wikiversité : suivre le lien en bas de page.
  4. a b et c Tschirnhaus 1683, aux notations près.
  5. a b et c Ces calculs sont détaillés (et testés sur un exemple) dans la seconde partie du devoir sur Wikiversité déjà mentionné.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :

Joseph-Alfred Serret, Cours d'algèbre supérieure, t. 1, , 3e éd. (1re éd. 1849) (lire en ligne), p. 420-430