Littérature de langue allemande

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
(Redirigé depuis Littérature allemande)

La littérature de langue allemande regroupe l'ensemble des œuvres littéraires de langue allemande. Elle ne se limite pas à la littérature produite en Allemagne, mais englobe celle produite en Autriche ainsi que dans la partie alémanique de la Suisse ou plus modestement dans la Communauté germanophone de Belgique (les cantons de l'Est). L'histoire littéraire, qui étudie tous les genres, retient différentes périodes aux contours souvent imprécis et discutés.

Née au Moyen Âge, la littérature de langue allemande a connu des périodes de grand rayonnement comme le Sturm und Drang (vers 1765-1785) avec Johann Wolfgang von Goethe et Friedrich von Schiller, le romantisme (vers 1796-1835) avec les frères Grimm, Heinrich von Kleist et les poètes Hölderlin, Jean Paul Richter, Novalis, Eichendorff, et un peu plus tard Heinrich Heine, avant la période Klassische Moderne (vers 1900 - années 1920) marqué par Hermann Hesse et Thomas Mann et un grand apport autrichien avec les poètes Hugo von Hofmannsthal et Rainer Maria Rilke et les prosateurs Hermann Broch, Robert Musil, Arthur Schnitzler, Joseph Roth ou Stefan Zweig qui avec Franz Kafka à Prague, ouvrent la voie de la modernité, sur laquelle pèse le nazisme qui contraint de nombreux auteurs à l'exil.

Enfin le renouveau littéraire depuis 1945 a été notable et marqué par plusieurs attributions du prix Nobel de littérature à des écrivains de langue allemande : Hermann Hesse en 1946, Nelly Sachs en 1966, Heinrich Böll en 1972, Elias Canetti en 1981, Günter Grass en 1999, Elfriede Jelinek en 2004, Herta Müller en 2009 et Peter Handke en 2019.

Époques et courants littéraires[modifier | modifier le code]

Moyen Âge[modifier | modifier le code]

Poème en vieux haut-allemand Muspilli (870)
Wolfram von Eschenbach, Codex Manesse
Hans Sachs

La naissance de la littérature allemande remonte au IXe siècle. Le Chant de Hildebrand datant de 820 est considéré comme une œuvre fondatrice de la littérature en langue allemande. Seuls 68 vers subsistent aujourd'hui. Un autre texte très ancien (en althochdeutsch, « vieux haut allemand ») date du IXe ou Xe siècle : il s'agit des Formules magiques de Merseburg (Merseburger Zaubersprüche), deux formules en langue allemande qui représentent pour l'instant les seules contributions littéraires de la culture païenne dans les pays germaniques. Certaines chansons de héros (aussi en althochdeutsch) seraient cependant encore plus anciennes comme la Chanson d'Hildebrand (Hildebrandslied).

La seconde grande œuvre que le Moyen Âge a léguée est l'épopée héroïque de la Chanson des Nibelungen (Nibelungenlied), datant du XIIe siècle. Aux XIIe et XIIIe siècles, la littérature de cour sur le modèle de celle existant alors en France fait son apparition en mittelhochdeutsch (« moyen haut allemand », désigne l'allemand de la période 1050-1350). Les plus connus sont Erec (de Hartmann von Aue), Tristan et Iseult (Tristan und Isolde de Gottfried von Straßburg), Perceval (Parzival de Wolfram von Eschenbach) ainsi que la chanson de Walther von der Vogelweide Lanzelet, ou un roman du cycle arthurien en moyen haut-allemand. Il a été écrit vers 1200 par Ulrich von Zatzikhoven. Composé de 9 444 vers, le roman narre les aventures du chevalier Lanzelet. Il est le premier roman allemand de Lancelot[1]. Quelques autres grands auteurs voient le jour comme Walther von der Vogelweide, Hartmann von Aue. Au début du XIVe siècle, l'œuvre de Maître Eckhart fonde une importante littérature mystique, représentée également par Jean Tauler et Henri Suso. Au XIIIe siècle également, Heinrich der Glichesaere adapte une branche du Roman de Renart sous forme de poème narratif, sous le titre Reinhart Fuchs. Cette première fable animalière connue en langue allemande inspirera Gottsched et Goethe.

On trouve aussi Der Ackermann aus Böhmen de Johannes von Tepl, un dialogue entre un fermier et le diable consigné par écrit au XVe siècle. La Nef des Fous de Sébastien Brant, imprimée en 1498 et illustrée par Albrecht Dürer, est l'œuvre la plus populaire de son temps. C'est aussi l'époque des maîtres-chanteurs ou Meistersingern dont les poésies et les chansons sont très populaires. Le plus connu est certainement Hans Sachs dont Richard Wagner a fait un personnage central de son opéra Die Meistersinger von Nürnberg, utilisant même la mélodie de son chant Le Rossignol de Wittenburg (1523).

À la fin du XVIe siècle, l'éditeur Johan Spies publie Le Livre de Faust, dans lequel il brosse le portrait d'un homme dominé par la soif du savoir et s'éloignant de Dieu.

Après la Réforme protestante[modifier | modifier le code]

Le Baroque (vers 1600-1720)[modifier | modifier le code]

La littérature baroque est marquée par la guerre de Trente Ans, dont le roman emblématique et truculent est Les Aventures de Simplicius Simplicissimus de Hans Jakob Christoffel von Grimmelshausen. Ce roman picaresque raconte l'histoire d'un héros à travers les affres de la guerre. Il finit par choisir une vie de retraite et de méditation[2]. Il traduit par une exacerbation des sentiments, les émotions montant jusqu'à l'extrême.

Les poètes sont alors des nobles ou de riches bourgeois, parfois des religieux ou des tuteurs qui se tournent vers la littérature dans leur temps libre. Il existait aussi des poètes employés à la cour qui avaient plus ou moins le même statut que le « fou du roi ». Martin Opitz publie Aristarque ou Du mépris de la langue allemande. Il montre que l'allemand a toutes les qualités d'une langue littéraire. Il publie aussi en 1624 un Traité de la poésie allemande.

Les premières femmes apparaissent en littérature à cette époque, la plupart publiant cependant sous un pseudonyme. Elles font partie des nombreux cercles de poètes et de différentes académies littéraires comme la princesse de Saxe Maria Antonia Walpurgis.

La forme poétique la plus utilisée est alors le sonnet.

Parmi les poètes allemands baroques, Abraham a Santa Clara, Sigmund von Birken, Barthold Heinrich Brockes, Simon Dach, Paul Fleming, Andreas Gryphius, Johann Christian Günther, Friedrich von Logau, Johann Michael Moscherosch, Christian Weise.

Les Lumières (1720-1785)[modifier | modifier le code]

Gotthold Ephraim Lessing

Les Lumières sont un phénomène européen. En Allemagne, son représentant le plus important est le philosophe Emmanuel Kant qui écrit entre autres Réponse à la question : « qu'est-ce que les Lumières ? ». Moses Mendelssohn, Friedrich Heinrich Jacobi y ont aussi fait des contributions importantes. Christoph Martin Wieland cherche à introduire la culture gréco-latine. Il écrit Agathon, roman pseudo grec en plusieurs volumes, mettant en scène une Hellade déjà de teneur romantique. Il traduit aussi William Shakespeare en allemand[3].

Les philosophes de cette époque sont profondément convaincus que le progrès de l'humanité repose sur la formation et l'éducation de chacun. Deux courants philosophiques importants cohabitent pour former les « Lumières » : l'empirisme anglais d'après lequel la connaissance repose sur la perception des sens et le rationalisme français, d'après lequel la connaissance résulte de l'utilisation des capacités de réflexion et de la raison. Toute la vie est perçue comme un processus d'apprentissage.

Une œuvre marquante est Nathan le Sage de Gotthold Ephraim Lessing.

Sturm und Drang (vers 1765-1785)[modifier | modifier le code]

Sturm und Drang est un mouvement littéraire contestataire de la deuxième moitié du XVIIIe siècle, nommé ainsi d'après une pièce de Friedrich Maximilian Klinger. Le noyau de ce mouvement est une jeunesse qui se révolte contre la structure de la société (dominée par la noblesse et la bourgeoisie) et contre les principes moraux bourgeois qui y règnent.

Les héros des pièces et romans de ce mouvement essayent de rompre les conventions et les représentations morales. Ils créent leurs propres règles basées sur la justice et la liberté.

Les figures emblématiques de ce mouvement sont Johann Wolfgang von Goethe et Friedrich von Schiller. Les Souffrances du jeune Werther (Die Leiden des jungen Werthers) de Goethe est le roman clé de ce mouvement. On trouve aussi Jakob Michael Reinhold Lenz ainsi que d'autres auteurs réunis à Göttingen.

Les villes porteuses de ce mouvement étaient Göttingen, Strasbourg ainsi que Francfort-sur-le-Main.

Weimarer Klassik (classicisme de Weimar) (vers 1786-1805)[modifier | modifier le code]

Goethe en Italie (1787).
Schiller à Weimar

Ce terme désigne en littérature allemande l'époque commençant après le voyage de Goethe en Italie en 1786. Elle s'achève vers 1805, année de la mort de Schiller. Cette période, dominée par le quatuor de Weimar (Wieland, Herder, Goethe et Schiller), recoupe la période de création de Goethe et Friedrich von Schiller alors amis (1794-1805). Les deux versions de Faust écrites par Goethe en 1806 et 1822, sont les apogées de son œuvre. Sa pièce Iphigénie en Tauride tente de dépasser les préjugés et marque à sa façon l'idéal humaniste des classiques (ce dernier mot ayant à l'époque une connotation positive).

Au centre de ce concept d'art se trouve la volonté d'harmonie et d'aplanissement des contraires. On se réfère à l'art classique et à son idéal de beauté, on cherche l'adéquation entre le fonds et la forme. Goethe cherche dans la nature un modèle pour les interactions universelles de l'ensemble des choses existantes, Schiller fait de l'histoire le point central de toute chose. Ce dernier compose à cette époque la plupart de ses balades (L’Otage) et toute une série de pièces de théâtre historiques (Wallenstein“, Guillaume Tell). Jusque dans ses poésies, il n'hésite pas à aborder des thèmes philosophiques (par exemple dans Promenade).

Romantisme (vers 1796-1835)[modifier | modifier le code]

Le romantisme allemand en littérature chevauche en partie le « classicisme » de Goethe (1749-1832) et Schiller (1759-1805) réunis à Weimar. « Trois auteurs, sans renier le courant classique, annoncent déjà le romantisme »: le « poète lyrique » Hölderlin (1770-1843), l' « auteur dramatique » Heinrich von Kleist (1771-1811); le « romancier » Jean-Paul Richter dit Jean-Paul (1763-1825)[4].

Les « théoriciens du romantisme » sont Friedrich Schleiermacher (1768-1834) sur (« l'union mystique avec Dieu »), Johann Gottlieb Fichte (1762-1814) (par rapport à « la primauté du moi absolu ») et Friedrich Wilhelm Schelling (1775-1854) (pour « “l'âme du monde” »), « fondateur de la philosophie romantique de la nature ». Fichte, « professeur à l'université d'Iéna, exerce sur les premiers romantiques une véritable fascination » dans « une époque d'incertitudes » en voyant « dans le système kantien une armature solide sur laquelle fonder la morale et la notion de devoir ». Par la suite, « Fichte, déçu par la Révolution française qu'il avait tout d'abord admirée, écrira ses Discours à la Nation allemande (Reden an die deutsche Nation, 1807) où il transposera sur le plan national sa théorie du « moi absolu », affirmant la mission spirituelle conquérante de la nation allemande »[5].

Selon Chassard et Weil, le romantisme proprement dit (1798-1835) comporte quatre courants : « les préromantiques ou école d'Iéna » qui sont les « fondateurs de la doctrine », l' « apogée du romantisme ou école de Heidelberg » qui représente le « romantisme militant », le « romantisme tardif » avec , entre autres, Joseph von Eichendorff, E.T.A. Hoffmann, Adalbert von Chamisso, dont « l'un des centres est Berlin (1810) »; enfin « le romantisme nordique et le romantisme souabe » plus « aimable, souriant » proche du « lyrisme populaire » avec, par exemple, Ludwig Uhland, Wilhelm Müller, et le « plus éminent », Mörike qui « chevauche à la fois la période romantique et celle de la Restauration (Biedermeierzeit) »[6].

Les Romantiques des premières générations, Sturm und Drang et Cercle d'Iéna : Goethe est au centre, Schiller à l'extrémité droite, Tieck sur la gauche de Goethe...
  • L'école d'Iéna, très cosmopolite est représentée entre autres par les frères Schlegel (August-Wilhelm et Friedrich Schlegel), Wackenroder, Tieck, Novalis[7]. Les frères Schlegel fondent la revue de l'Athenaeum, « pour y développer leurs idées sur l'art et la poésie nouvelle, ils définissent celle-ci en l'opposant à celle des anciens: “La poésie des anciens était celle de la possession, la nôtre est celle de la nostalgie. Celle-là repose sur le sol du présent, celle-ci flotte entre le souvenir et le pressentiment.” »[8].

Il faut insister sur « le rôle des femmes » dans l'école d'Iéna, « étroitement mêlées aux discussions » en particulier dans la maison des Schlegel, comme l'était Caroline Schlegel-Schelling. La personnalité affirmée de Bettina von Arnim témoigne de l'absence « des préjugés qui pèsent encore sur les rôles respectifs de l'homme et de la femme dans la société ». Dorothea Schlegel, auteur d'un roman inspiré du Wilhelm Meister de Goethe, « apparaît comme l'une des initiatrices de l'émancipation spirituelle de la femme »[9].

  • L'école de Heidelberg qui regroupe Clemens Brentano, Achim von Arnim et les frères Grimm, se penche moins vers la réflexion. Ce sont surtout « des créateurs »[10]. « Le sentiment national, né de l'oppression napoléonienne, anime souvent leurs écrits » et les pousse à rechercher « dans les valeurs du passé » un « soutien dans leur lutte »; de ce fait, ils se rattachent « volontiers aux institutions qui sont le garant de la tradition : le peuple, l'État, l'Église »[11].

Biedermeier (vers 1815-1848)[modifier | modifier le code]

Le terme Biedermeier désigne la période de la restauration entre 1815 et 1848. Ce nom vient du pseudonyme Gottlieb Biedermeier pris par deux auteurs célèbres de l'époque (Ludwig Eichrodt (de) (1827-1892) et Adolf Kussmaul (1822-1902)). Le concept renvoie à un certain art de la petite-bourgeoisie. En littérature, cet art est considéré comme provincial, d'un esthétisme infantile et suant les bons sentiments.

Cette période littéraire autrichienne est faite d'un art de piètre qualité mais qui donnait, par son style sans originalité et ses histoires d'une platitude effarante, un divertissement apprécié aux petits-bourgeois de l'Empire. Quelques auteurs comme Johann Nestroy ont néanmoins su jouer sur les deux tableaux en présentant d'un côté des pièces populaires, mais aussi en y instillant une causticité nouvelle[réf. nécessaire].

Plusieurs auteurs qui ont connu leur heure de gloire à cette époque : Gottlieb Biedermeier, Annette von Droste-Hülshoff, Wilhelm Hauff, Carl Leberecht Immermann, Eduard Mörike, Ferdinand Raimund, Friedrich Rückert.

Pendant la même période d'autres écrivains se distinguent néanmoins et restent au Panthéon des lettres germaniques comme le poète Nikolaus Lenau, le dramaturge Franz Grillparzer ou l'écrivain Adalbert Stifter.

Vormärz (vers 1830-1850) et Junges Deutschland[modifier | modifier le code]

Georg Büchner

Cette époque est comprise entre le Congrès de Vienne de 1815 et la révolution de mars 1848. En littérature, cette période ne commence qu'à partir de 1830, et est influencée par les idées libérales que véhicule la Révolution de Juillet en France. Le mouvement Junges Deutschland (« Jeune-Allemagne »), entre en opposition à la restauration. Les principaux représentants de ce courant sont : Georg Büchner, Heinrich Heine, Christian Dietrich Grabbe, Ludwig Börne, August Heinrich Hoffmann von Fallersleben et Georg Herwegh. Écrivains engagés, ils combattent contre la politique très conservatrice de Metternich et des princes. Ils veulent obtenir la démocratie, la liberté, la justice sociale, et militent pour une Allemagne unie sous la forme d'une République. D'un point de vue littéraire, ils refusent l'idéalisme du romantisme et du classique, qu'ils considèrent comme apolitique et éloigné de la réalité. Leurs écrits prennent souvent des formes diverses, textes journalistiques ou récits de voyages, et témoignent d'une volonté de s'adresser au plus grand nombre, et non plus seulement aux intellectuels. Leurs œuvres sont interdites de publication par décret du Bundestag de Francfort pour toute l'Allemagne à partir de 1835/1836.

Le réalisme poétique (1848-1890)[modifier | modifier le code]

Dans le réalisme poétique, les auteurs évitent les grands problèmes socio-politiques et se tournent vers leur pays d'origine - leurs habitants et leurs paysages. Au centre des romans, pièces et poèmes se trouve l'individu. Une caractéristique de ces œuvres est l'emploi fréquent de l'humour qui crée une distance par rapport à une réalité insupportable. Il pointe les défauts et faiblesses d'un des maillons de la société sans pour autant s'attaquer au système. La forme littéraire préférée est la nouvelle, qui fleurit à l'époque.

Quelques œuvres marquantes : Frau Jenny Treibel de Theodor Fontane, Romeo und Julia auf dem Dorfe de Gottfried Keller, Das Amulett de Conrad Ferdinand Meyer, Der Schimmelreiter de Theodor Storm et Nachsommer d'Adalbert Stifter. La saga des Buddenbrook de Thomas Mann, qui dépend encore de cette école littéraire, et en constitue un des points d'aboutissement (l'influence de Theodor Fontane, notamment, est marquée).

Le naturalisme (1880-1900)[modifier | modifier le code]

À partir de 1890, la vie littéraire allemande s'anime à nouveau grâce aux écrivains autrichiens. La littérature allemande compte cependant de grands noms. Le naturalisme était un art nouveau, une nouvelle direction en littérature, qui voulait découvrir sans ménagements les rapports dans tous les domaines de la société. Ce que les réalistes au milieu du siècle réprouvaient encore se trouve maintenant au centre des préoccupations. Sans égards pour les limites traditionnelles du bon goût et des conceptions bourgeoises artistiques, la réalité est rendue telle quelle, crue, sans embellissements. Une nouveauté artistique qui en découle est l'apparition du jargon, des dialectes ou de la langue de tous les jours dans les œuvres littéraires. Le héros individuel qui choisit librement n'est plus au centre des narrations, désormais, il y est présenté déterminé par son milieu, ses origines et les circonstances temporelles.

Quelques œuvres : Frühlings Erwachen de Frank Wedekind, Bahnwärter Thiel de Gerhart Hauptmann, Tristan et Der Tod in Venedig (La Mort à Venise) de Thomas Mann.

L'Impressionnisme (vers 1890-1910)[modifier | modifier le code]

Étant un mouvement essentiellement franco-anglais, l'impressionnisme n'a pas eu beaucoup d'influence en Allemagne, en dehors de Keyserling.

Heimatkunst[modifier | modifier le code]

Le Heimatkunst (« art de la patrie ») est en relation étroite avec le naturalisme. Le propagandiste principal de ce nouveau mouvement est l'écrivain et historien de l'art Adolf Bartels qui utilise le concept de Heimatkunst pour la première fois en 1898 dans un article pour le magazine Der Kunstwart. Il répand les nouvelles idées et conceptions avec Friedrich Lienhard dans le magazine Heimat qui ne paraîtra à Berlin que très peu de temps.

Ce nouveau mouvement voulait s'écarter du sujet de la grande ville pour se tourner vers le pays, la patrie et le peuple. L'emploi du terme Heimat permet cependant de ne pas se cantonner à la vie de campagne, la vie citadine peut être aussi abordée puisque la ville peut être aussi un lieu d'origine. Comme le naturalisme à qui il emprunte diverses techniques, le Heimatkunst ne se contente pas d'exprimer son amour du pays, il critique aussi ses manques, ses défauts. Les recherches actuelles sur ce mouvement tendent à montrer que certaines des idées de base de ce mouvement sont les mêmes que celles des mouvements écologiques actuels.

Quelques œuvres :

Jugendstil[modifier | modifier le code]

Klassische Moderne (vers 1900 - années 1920)[modifier | modifier le code]

Pour le Klassische Moderne (« modernité classique »), le concept d'avant-garde est particulièrement important. Cette époque commence à la fin du XIXe siècle avec le symbolisme français et des poètes comme Stéphane Mallarmé, Charles Baudelaire et Arthur Rimbaud. Les représentants les plus importants du symbolisme en langue allemande sont Stefan George, Hugo von Hofmannsthal et Rainer Maria Rilke.

Ce mouvement englobe aussi bien le surréalisme, le dadaïsme, l'expressionnisme que le futurisme. En Allemagne, le nazisme puis la Seconde Guerre mondiale provoquent une césure dans ces mouvements le plus souvent désignés sous le terme d'avant-garde.

La littérature d'avant-garde se veut être une littérature orientée vers la nouveauté et très portée sur la théorie. Les dadaïstes s'essayent ainsi à brusquer leur public à formation bourgeoise en leur proposant une littérature de non-sens. Le Wiener Aktionismus avait choisi comme point d'attaque le « bon goût » et provoquait à travers des performances extrêmes.

Parallèlement à ces courants dirigés contre la tradition, des œuvres reprennent les anciennes formes et les développent comme Rainer Maria Rilke avec son roman Die Aufzeichnungen des Malte Laurids Brigge (1910), Heinrich Mann (dont les débuts ont préparé la voie aux expressionnistes), Thomas Mann, Hermann Broch, Robert Musil et Franz Kafka.

La forme des œuvres de Thomas Mann s'inscrit dans la continuité d'un mouvement romantique hérité des Lumières, un romantisme de première époque en quelque sorte, considérant avec autant d'importance tous les aspects différents du savoir ; ainsi, La Montagne magique nous apprend tout sur la médecine pulmonaire, tandis que dans Le Docteur Faustus, c'est de la musique sérielle ou dodécaphonique qu'il est question. En parallèle de la trame de l'histoire qu'il nous conte, et quand cette dernière effleure une des facettes du savoir, surgissent alors çà et là des digressions ne laissant rien au hasard et qui satisferait tout spécialiste, aussi pointilleux soit-il.

Christian Morgenstern (1871-1914) peut difficilement se ranger dans une catégorie : à la fois précurseur du surréalisme et du lettrisme (die grosse Lullabi), il voit monter le désastre de la Première Guerre mondiale, pressent le cataclysme de la Seconde et suggère, en réaction aux barbaries émergentes, un retour aux valeurs de l'esprit dont il se fait le chantre. (Wir fanden einen Pfad). Le début du XXe siècle voit aussi l'éclosion de grands poètes comme Stefan George, qui publie des poèmes proches du symbolisme français[12]. La littérature allemande, très riche et reconnue pendant la République de Weimar, est décimée par l'arrivée du nazisme. Des écrivains de renommée internationale comme Walter Benjamin, Lion Feuchtwanger, Alfred Döblin, Thomas Mann choisissent l'exil.

Autres : Cosmiques (Munich).

Expressionnisme (vers 1910-1925)[modifier | modifier le code]

Menschheitsdämmerung, anthologie de poésie de l'expressionnisme allemand établie par Kurt Pinthus, 1920.

La poésie est peut-être le genre le plus représentatif du mouvement expressionniste en littérature: elle est très mal connue en France et peu traduite. Elle est notamment représentée par Georg Trakl (1887-1914), Else Lasker-Schüler (1869-1945), Georg Heym (1887-1912), Franz Werfel (1890-1945), Bertolt Brecht (1898-1956) ou encore par Gottfried Benn (1886-1956) ou Joachim Ringelnatz (1883-1934).

On rattache aussi les romans de Franz Kafka (1883-1924) à l'expressionnisme, ainsi que plusieurs auteurs dramatiques allemands du début du XXe siècle, tels que Georg Kaiser (1878-1945) ou Ernst Toller (1893-1939).


Le dadaïsme (vers 1916 - Seconde Guerre mondiale)[modifier | modifier le code]

Dada est né le à Zurich (Suisse) par la grâce des poètes Hugo Ball, Richard Huelsenbeck, Tristan Tzara et des peintres Jean Arp, Marcel Janco, Sophie Taeuber. Ils investissent une taverne de la Spiegelstrasse, la transforment en café littéraire et artistique et la rebaptisent « Cabaret Voltaire ».

Le nazisme et ses conséquences en littérature[modifier | modifier le code]

La littérature dans l'Allemagne nazie[modifier | modifier le code]

Le , Adolf Hitler arrive au pouvoir en Allemagne. Toute forme de littérature critique à l'égard du nouveau pouvoir ne tarde pas à être interdite. Des milliers de livres sont alors brûlés sur de grands bûchers durant l'année 1933.

Le pouvoir nazi, tout en promouvant une littérature du sang et de la terre (Blut und Boden), cherche à amadouer des écrivains de renom en les faisant entrer dans des institutions officielles comme la Chambre de la littérature du Reich (Reichsschrifttumskammer). Il sollicite ainsi des auteurs notoirement nationalistes comme Ernst Jünger ou Ernst von Salomon, qui déclinent les offres qui leur sont faites, mais aussi des auteurs réputés libéraux comme Gerhart Hauptmann. Il peut compter sur le ralliement, au moins temporaire dans certains cas, de Gottfried Benn, Arnolt Bronnen (de), Hanns Heinz Ewers, Hanns Johst, Erwin Guido Kolbenheyer et Josef Weinheber.

Parallèlement, le pouvoir proscrit les écrivains communistes ou juifs et, plus largement, les écrivains de gauche ou non qui refusent de se soumettre. Les opposants au régime sont menacés de mort ou emprisonnés (comme Ludwig Renn ou Carl von Ossietzky, qui meurt à la suite de mauvais traitements) lorsqu'ils n'ont pas pris le chemin de l'exil, de force ou volontairement.

De nombreux écrivains restent néanmoins en Allemagne, bien qu'ils s'opposent, dans certains cas, au national-socialisme. Ils sont condamnés au silence, laissent leurs écrits dans des tiroirs ou se cantonnent à des thèmes non politiques. Parmi les plus célèbres, on peut citer, outre Gerhart Hauptmann, Erich Kästner et Wolfgang Koeppen.

À partir de l'Anschluss en 1938, le pouvoir nazi mènera la même politique dans la province autrichienne.


La littérature de l'exil[modifier | modifier le code]

L'Exilliteratur allemande (1933-1945) est apparue en réaction contre le nazisme. Deux événements majeurs la marquèrent : les autodafés à Berlin le et l'attaque de l'Allemagne contre les pays voisins en 1938-1939. Des centres d'émigrés se développèrent à Paris, Amsterdam, Stockholm, Zürich, Prague, Moscou, New York ou encore Mexico. Des maisons d'édition allemandes s'y montèrent.

Parmi les auteurs allemands en exil, on peut citer Bertolt Brecht, Alfred Döblin, Ernst Bloch, Lion Feuchtwanger, Bruno Frank, Leonhard Frank, Oskar Maria Graf, Hermann Kesten, Annette Kolb, Emil Ludwig, Heinrich Mann, Klaus Mann, Thomas Mann, Gustav Regler, Erich Maria Remarque, Anna Seghers ou encore Arnold Zweig. Il y eut aussi Ernst Toller, Walter Hasenclever, Walter Benjamin et Kurt Tucholsky qui se suicidèrent en exil.

Parmi les écrivains restés en Allemagne, certains se réfugièrent dans une émigration intérieure (innere Emigration). Cette expression s'appliqua aux auteurs opposés au nazisme qui firent le choix de rester silencieux ou de se retirer de toute vie publique. Parmi ceux-ci, on compte : Stefan Andres (de), Werner Bergengruen, Hans Fallada, Erich Kästner, Ernst Kreuder, Gertrud von Le Fort, Reinhold Schneider (de), Ehm Welk (de) et Ernst Wiechert.

L'Holocauste et la littérature des survivants[modifier | modifier le code]

L'écrivain qui semble être le plus important dans cette partie de l'histoire de la littérature est sans doute Marcel Reich-Ranicki, surtout par le témoignage qu'il nous donne concernant les atrocités que l'on faisait subir aux juifs notamment dans le ghetto de Varsovie dans son autobiographie intitulée Mein Leben.

La Trümmerliteratur[modifier | modifier le code]

Après la Seconde Guerre mondiale et jusqu'en 1950 environ apparaît la « littérature des ruines », la Trümmerliteratur, qui décrit l'Allemagne en ruines et la littérature allemande détruites.

Les principaux auteurs de ce courant littéraire sont :

Particularités nationales[modifier | modifier le code]

La littérature autrichienne[modifier | modifier le code]

Felix Salten, auteur de Bambi adapté par Disney, faisait partie des cercles littéraires et artistiques de Vienne et fréquentait Thomas Mann, Arthur Schnitzler, Hugo von Hofmannsthal et Gustav Klimt, les Strauss ainsi que Sigmund Freud. Salten a été président du PEN club autrichien de 1925 à 1934, d'où il fut chassé par les nazis pour « manque de caractère ».

Plusieurs écrivains autrichiens émigrent dans les années 1930, particulièrement après l'Anschluss, dont Stefan Zweig, Hermann Broch, Carl Zuckmayer et Franz Werfel.

La littérature de la RDA[modifier | modifier le code]

L’ensemble de la littérature était contrôlé par le parti unique, le SED. Les écrivains, qui bénéficiaient de nombreux avantages, se devaient d’être un intermédiaire entre le parti et les masses. La RDA se définissait elle-même comme Literaturgesellschaft (« société de littérature ») (le concept vient de Johannes R. Becher, le premier ministre de la culture de la RDA), elle se battait contre la non-poésie de l'ouest et la « ghettoïsation » de la culture élevée.

Une démocratisation devait être mise en place aux niveaux de la production, de la distribution et de la réception. Néanmoins, le concept de démocratisation devint absurde du fait de la censure et des tentatives de l'État de contrôler la création, de fonctionnaliser la littérature et de l'utiliser à ses fins pour la propagande du Realsozialismus.

On peut décomposer l’histoire de la littérature en RDA en plusieurs phases : les années 1950 sont celles de l’Aufbauliteratur (« littérature de construction »). Les écrivains de retour d’exil et installés en RDA comme Bertolt Brecht occupent une place centrale. Dans les années 1960, une fois le modèle du Realsozialismus installé, on parle d’Ankunftsliteratur (« littérature de l’arrivée », en référence à l’ouvrage Ankunft im Alltag (de) de Brigitte Reimann). À partir des années 1970, de plus en plus d’écrivains prennent leurs distances avec leur parti et doivent parfois en payer le prix (interdiction de publier, sanctions voire expulsions hors de la RDA…).

La littérature suisse alémanique[modifier | modifier le code]

La littérature alsacienne[modifier | modifier le code]

Après une période florissante au XVIe siècle où se développe un style propre aux auteurs alsaciens de langue allemande[13], la littérature alsacienne est presque réduite au silence par les dévastations de la guerre de Trente Ans (1618-1648), qui fait disparaître la moitié de la population, et par ses suites. Elle ne refleurit qu'au XIXe siècle avec toute une série d'auteurs en langue allemande et en dialecte alsacien, dont les emblématiques Ehrenfried, Auguste et Adolphe Stoeber. La production en allemand littéraire tend à s'éteindre après 1918 tandis qu'émerge une littérature alsacienne en français et que subsiste une tradition de création littéraire, poétique ou théâtrale, en dialecte.

Littérature de la seconde partie du XXe siècle[modifier | modifier le code]

Après la Seconde Guerre mondiale, le groupe 47 est créé avec le triple objectif de refonder la scène littéraire et la langue allemande et de redonner à l'Allemagne sa place dans la littérature mondiale. À la fois forum de lecture, lieu de débat et de critique littéraire, il exerce une influence majeure en Allemagne jusqu'en 1967. Parmi ses membres, on trouve Ingeborg Bachmann, Heinrich Böll, dont les romans interrogent les conséquences du nazisme et de la guerre dans la société allemande, Paul Celan, Uwe Johnson et Peter Weiss[14].

Günter Grass, également membre de ce groupe et lauréat du prix Nobel de littérature, introduit l’histoire de l'Allemagne nazie en littérature, notamment dans son roman Le Tambour. Il est le chef de file d'une génération en quête de réponses à ses interrogations morales. Hans Magnus Enzensberger, Siegfried Lenz et Botho Strauss font partie de la même mouvance. Une nouvelle génération d'écrivains revient à la tradition du récit. Sten Nadolny, Uwe Timm, F. C. Delius, Brigitte Kronauer et Ralf Roth, qui ont débuté dans les années 1980, en sont les représentants emblématiques.

La littérature allemande contemporaine est encore représentée par d'autres écrivains qui ont rencontré le succès au-delà de l'Allemagne : Patrick Süskind (1949-), qui est l'auteur du Parfum, Bernhard Schlink (1944-), qui a écrit Le Liseur et un recueil de nouvelles, Amours en fuite, ou encore l'auteur de romans policiers Ferdinand von Schirach.

Et, en Suisse, le Groupe d'Olten (1970-2002), dont Peter Bichsel (1935-), Thomas Hürlimann (1950-), Hugo Loetscher (1929-2009), Adolf Muschg (1934-), Urs Widmer (1938-2014)...

Littérature du XXIe siècle[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Wolfgang Spiewok/Danielle Buschinger, Histoire de la littérature allemande du Moyen Âge, Nathan, 1992, p. 163.
  2. Sous la direction de David Brabis, Allemagne, Le Guide vert Michelin, 2004, p. 84.
  3. Manuel de Diéguez, Langue, culture et civilisation, Le Monde, 2 août 2003
  4. J. Chassard / G. Weil, Histoire de la littérature de langue allemande, Paris, Hachette, 1981, p. 120-130 (ISBN 2 01-005613-2).
  5. J. Chassard / G. Weil, p. 137-138
  6. J. Chassard / G. Weil, p. 132 et 137.
  7. Voir Henri d'Ofterdingen, Les Disciples à Saïs et les Hymnes à la Nuit.
  8. J. Chassard / G. Weil, p. 135..
  9. J. Chassard / G. Weil, p. 145.
  10. J. Chassard / G. Weil, p. 133
  11. J. Chassard / G. Weil, p. 146..
  12. Sous la direction de David Brabis, p. 86
  13. « Il est permis de dire que Murner comme Brant et Geiler incarnent le génie alsacien porté à l’engagement moral, à la satire ou à l’humour. Ces grands anciens ont fondé une tradition vivante jusqu’à nos jours, tradition qui se réfère volontiers à eux.» Citation du professeur Adrien Finck, dans son article "La littérature alsacienne", mis en ligne le 1er décembre 2010 sur le site du CRDP de Strasbourg, consulté le 20 mai 2017 [1]
  14. Sous la direction de David Brabis, p. 87

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Ouvrages généraux[modifier | modifier le code]

Études spécialisées[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]