Jeanne Hébuterne

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Jeanne Hébuterne
Jeanne Hébuterne, photographie anonyme non sourcée.
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 21 ans)
ParisVoir et modifier les données sur Wikidata
Sépulture
Cimetière du Père-Lachaise (depuis ), cimetière parisien de Bagneux ( - ), Grave of Amedeo Modigliani and Jeanne Hébuterne (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activités
Formation
Fratrie
Enfant
La tombe de Jeanne Hébuterne au cimetière du Père-Lachaise.
Jeanne Hébuterne en 1917.
Tombe de Jeanne Hébuterne au cimetière du Père-Lachaise à Paris.

Jeanne Hébuterne , née le à Meaux (France) et morte le à Paris[1], est une artiste peintre française. Elle était surnommée « Noix de coco » en raison de son teint blanc laiteux contrastant avec ses cheveux châtain aux reflets roux.

Biographie[modifier | modifier le code]

La famille Hébuterne est originaire du village de Varreddes (nord de la Seine-et-Marne). Le grand-père paternel de Jeanne Hébuterne y est né. Son père, Achille Casimir Hébuterne, y exerce la profession de comptable, et sa mère, Eudoxie Anaïs Tellier, remplit le rôle de maîtresse de maison. Jeanne Hébuterne naît le à Meaux au no 51 avenue de la République [2].

En 1917, Jeanne Hébuterne étudie la peinture à l'Académie Colarossi à Paris, au 10 rue de la Grande-Chaumière dans le quartier Notre-Dame-des-Champs, à Montparnasse qui tend à supplanter à cette époque Montmartre comme haut lieu de la bohème artistique.

C'est son frère André Hébuterne, lui-même peintre paysagiste, qui l'a introduite dans ce milieu. Elle est modèle du peintre Foujita. La sculptrice ukrainienne Chana Orloff lui présente Amedeo Modigliani en , à la brasserie La Rotonde. Selon un autre témoignage, c'est lors d'un bal masqué que Modigliani, déguisé en Pierrot, aurait abordé Jeanne pour la première fois.

Selon Chana Orloff, ses yeux sont vert pâle, Modigliani les peindra toujours en bleu. La jeune fille de bonne famille vit une passion tumultueuse avec le peintre dont la santé chancelle déjà.

Les parents de Jeanne Hébuterne voient d'un très mauvais œil cette liaison. Ils sont fervents catholiques, alors que Modigliani est juif, à cette époque où l'antisémitisme demeure banal. Le peintre a une réputation bien établie de toxicomane et d'alcoolique. Jeanne Hébuterne rompt alors avec sa famille.

Elle s'installe avec Modigliani au no 8 rue de la Grande-Chaumière, juste à côté de l'Académie Colarossi, dans un atelier que leur loue Léopold Zborowski, l'agent du peintre qui peine alors à vendre ses toiles. Néanmoins, convaincu du talent de Modigliani, Zborowski envoie le couple se reposer à Nice où, le , Jeanne Hébuterne met au monde une petite fille, déclarée en premier lieu à l'état civil sous le nom de Jeanne Hébuterne (1918-1984)[3]. Modigliani l'aurait reconnue tardivement pour lui donner son nom. D'autres sources indiquent que c'est la sœur de Modigliani qui adoptera l'enfant après la mort de ses parents, afin que celle-ci porte le nom de son père. La petite est placée par la suite en nourrice à Chaville près de Versailles, et deviendra la biographe de son père.

À l'automne 1919, le couple est de retour à Paris. Mais Jeanne Hébuterne cesse peu à peu toute activité artistique après avoir fait de la photographie et créé des bijoux et des vêtements. De nouveau enceinte, elle est devenue le modèle préféré du peintre.

L'état de santé de Modigliani ne cesse de s'aggraver. Atteint de pleurésie depuis l'enfance, puis de méningite tuberculeuse, il abuse depuis bien trop longtemps de drogues et d’alcool. Il meurt à 35 ans, au soir du . Les parents de Jeanne Hébuterne consentent alors à accueillir à nouveau cette désespérée nantie d'un enfant et sur le point d'accoucher du second. Le surlendemain, vers quatre heures du matin, échappant à la vigilance de son frère, Jeanne Hébuterne se jette par la fenêtre du 5e étage de l’appartement de ses parents au no 8 bis rue Amyot, dans le 5e arrondissement de Paris[4],[5].

Chantal Quenneville, qui a été son amie à l'Académie Colarossi, rapporte les faits suivants : « Le corps disloqué avait été ramassé dans la cour par un ouvrier qui l'avait transporté jusqu'au palier du cinquième étage, où les parents épouvantés lui avaient fermé la porte au nez. Le corps avait été ensuite transporté par ce même ouvrier, dans une carriole, jusqu'à l'atelier de la Grande Chaumière, où le portier l'avait refusé, déclarant qu'elle n'était pas locataire officielle ». À la fin, cet ouvrier alla au commissariat où on lui dit de le ramener, sur ordre de la police, rue de la Grande-Chaumière. Le corps resta là, abandonné, toute la matinée[6]. »

Le , Modigliani est enterré au cimetière du Père-Lachaise, accompagné des artistes de Montmartre et de Montparnasse, notamment Picasso, Soutine, Vlaminck, Cendrars. Jeanne Hébuterne est enterrée le lendemain au petit jour au cimetière de Bagneux dans l'intimité. Achille Hébuterne a refusé aux amis de Modigliani de faire enterrer sa fille aux côtés du peintre. Il faudra attendre 1930 avant qu'il revienne sur sa décision.

Une étude[7] publiée par le NCBI en 2018 indique que Jeanne Hébuterne était atteinte de dystonie cervicale, et que cela peut se voir dans les photos de l'époque et dans les peintures de Modigliani.

Postérité[modifier | modifier le code]

Dans les années 1990, la chanteuse française Véronique Pestel lui rend hommage à travers la chanson Jeanne Hébuterne. Chanson qui sera reprise par Jann Halexander sur son album Un bon chanteur est un chanteur mort en 2014.

Au cinéma, elle a été incarnée par Anouk Aimée dans le film Montparnasse 19 de Jacques Becker, et par Elsa Zylberstein dans le film Modigliani de Mick Davis.

En 2006, c'est la romancière France Huser qui publie un roman, La Fille à lèvre d'orange, dont Jeanne Hébuterne est l’héroïne. D' à , l'autrice « à travers un journal imaginaire, recrée le quotidien passionnel des deux amants. »

En 2002, c'est dans l'atelier de son frère André Hébuterne, au no 12 rue de Seine à Paris, que furent découvertes neuf de ses peintures ayant séjourné dans la cave depuis 1978. Elles furent présentées une seule journée au musée du Montparnasse à Paris, et à nouveau à l'exposition Amadeo Modigliani, de Montmartre à Montparnasse à Ancone, Caserte et Bari. Seules six peintures d'elle étaient connues avant cette découverte. Elles représentent des portraits de famille et des vues des bâtiments proches de son domicile. Une dixième a été découverte en 2003 chez un brocanteur en Allemagne.

En 2017, l'auteure Olivia Elkaim publie un roman (Je suis Jeanne Hébuterne, éd. Stock) dans lequel Jeanne Hébuterne raconte sa passion pour Modigliani[8],[9],[10],[11],[12].

En 2018, dans l'ouvrage Vers la beauté (éditions Gallimard) de David Foenkinos, le personnage principal admire l'un des portraits de Jeanne Hébuterne peints par Modigliani, c'est le début de sa guérison par le beau[13].

Expositions[modifier | modifier le code]

  • Février 2003 : exposition : Amedeo Modigliani, de Montmartre à Montparnasse ; Ancon, Caserte, Bari : présentation des neuf toiles découvertes dans l'atelier de son frère.
  • 2012 : Modigliani, Soutine et l'Aventure de Montparnasse - La Collection Jonas Netter, à la Pinacothèque de Paris.
  • 2021 : Les Muses de Montparnasse au musée Pouchkine de Moscou du 15 juillet au 3 octobre 2021

Galerie[modifier | modifier le code]

Œuvres de Jeanne Hébuterne[modifier | modifier le code]

Portraits par Modigliani[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. cf https://www.connaissancedesarts.com/arts-expositions/jeanne-hebuterne-artiste-enigmatique-et-muse-damedeo-modigliani-11140018/
  2. Archives de la Seine-et-Marne, commune de Meaux, acte de naissance no 89, année 1898 (pages 212/367)
  3. AD06 - 2 E 610 Vue 462/537 Acte 1453 : https://archives06.fr/ark:/79346/ecefd85406e32eb8f9c2712e849b9164f7/daogrp/0/462
  4. Archives de Paris 5e, acte de décès no 139, année 1920 (page 19/31)
  5. (en)Oxford Index, Bénézit
  6. Catalogue de l'exposition « Amedeo Modigliani, 1884-1920 » - Musée d'art moderne de la ville de Paris (26 mars-28 juin 1981), p.95.
  7. (en) « Cervical Dystonia in Modigliani's Paintings: The Clue Was the Sensory Trick », sur www.ncbi.nlm.nih.gov, (consulté le )
  8. La rentrée littéraire en bref, LeMonde.fr, 2 novembre 2017, par Florence Bouchy, Stéphanie Dupays, Gladys Marivat, Ariane Singer, Elena Balzamo et Vincent Roy : "Olivia Elkaim signe un roman violent sur le désir. Et nous rend vivante la dernière muse du peintre"
  9. Portraits de muses avec artistes, LaCroix.com, 31 août 2017, par Stéphanie Janicot "Curieuse rentrée qui propose simultanément, et chez le même éditeur, trois ouvrages offrant des visions passionnantes et contrastées de l’art moderne à travers trois femmes étonnantes. Le plus intime de ces livres, le plus romanesque et émouvant, est celui d’Olivia Elkaim"
  10. "Les Livres ont la parole" : "Je suis Jeanne Hébuterne" d'Olivia Elkaim, rtl.fr, 4 septembre 2017, par Bernard Lehut
  11. Les livres de l'été, rts.ch, 26 août 2017, par Geneviève Bridel
  12. Vie et mort de la dernière muse de Modigliani, laregledujeu.org, 18 septembre 2017, par Laurent David Samama
  13. « « Vers la beauté » : la jeune fille et la mort », sur Les Echos, (consulté le )

Annexes[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Ralph Dutli, Le Dernier Voyage de Soutine, roman, traduit de l'allemand par Laure Bernardi, Le Bruit du temps, 2016
  • France Huser, La Fille à lèvre d'orange, Gallimard, Paris, 2006
  • Michel Georges-Michel, Les Montparnos, écrit en 1923, publié en 1929 et réédité à maintes reprises (Le Livre de poche en 1976), met principalement en scène, à Montparnasse, sous les noms de Modrulleau et Haricot-Rouge, Modigliani et Jeanne Hébuterne, au milieu des peintres de ce que l'on nommera l'École de Paris.
  • Marc Restellini, Le Silence éternel : Amedeo Modigliani et Jeanne Hébuterne, incluant le Catalogue raisonné de l'œuvre peint et dessiné de Jeanne Hébuterne, Éd. Pinacothèque, 2008, 224 p. (ISBN 2953054626)
  • Zoé Blumenfeld, « Jeanne Hébuterne, avec et sans Modigliani », in Le Quotidien des Arts, .
  • Alain Vircondelet, « Les couples mythiques de l'art », in Beaux Arts magazine, 2011.
  • Nadine van der Straeten, Jeanne Hébuterne, un souffle éphémère, lire en ligne : critique du Monde du 12 décembre 2017, 2017, Tartamudo (bande dessinée).
  • Olivia Elkaim, Je suis Jeanne Hébuterne, Paris, Stock, 2017.
  • Roberto Manescalchi, Mauro Nutricati, Amedeo Modigliani - Le dernier dessin pour Jeanne ?, traduction de Gianna Dimagli, 2021, Edizioni Grafica European Center of Fine Arts, (ISBN 8-8954-5082-5 et 9788895450827)

Filmographie[modifier | modifier le code]

Iconographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]