Henry Lémery

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Henry Lémery
Illustration.
Henry Lémery en 1918.
Fonctions
Ministre-secrétaire d’État aux Colonies

(1 mois et 25 jours)
Chef de l'État Philippe Pétain
Président du Conseil Pierre Laval
Gouvernement Laval V
Prédécesseur Albert Rivière
Successeur Charles Platon
Garde des Sceaux, ministre de la Justice

(24 jours)
Président Albert Lebrun
Président du Conseil Gaston Doumergue
Gouvernement Doumergue II
Prédécesseur Henry Chéron
Successeur Georges Pernot
Sénateur français

(16 ans, 2 mois et 13 jours)
Élection
Réélection 16 octobre 1932
Circonscription Martinique
Groupe politique GD puis NI

(3 ans, 11 mois et 18 jours)
Élection 18 janvier 1920
Circonscription Martinique
Groupe politique GD
Sous-secrétaire d’État aux Transports maritimes et à la Marine marchande

(1 an et 18 jours)
Président Raymond Poincaré
Président du Conseil Georges Clemenceau
Gouvernement Clemenceau II
Prédécesseur Anatole de Monzie
Successeur Étienne Clémentel
Député français

(5 ans, 11 mois et 6 jours)
Élection 26 avril 1914
Circonscription Martinique
Législature XIe (Troisième République)
Groupe politique URRRS
Biographie
Nom de naissance Joseph Eugène Henry Lémery
Date de naissance
Lieu de naissance Saint-Pierre (Martinique)
Date de décès (à 97 ans)
Lieu de décès Paris 7e (France)
Nationalité Française
Parti politique Indépendant
Diplômé de Faculté de droit de Paris
Profession Avocat
Religion Catholique

Henry Lémery[a], né le à Saint-Pierre et mort le à Paris, est un homme politique français.

Parlementaire entre 1914 et 1940, il est au début du XXe siècle le premier Martiniquais à devenir membre d'un gouvernement en France. Éphémère garde des Sceaux en 1934, il est ministre-secrétaire d’État aux Colonies de juillet à , au début du régime de Vichy.

Biographie[modifier | modifier le code]

Origines et formation[modifier | modifier le code]

Henry Lémery naît le à Saint-Pierre (Martinique). Son père est un béké et sa mère une femme de couleur, « la négresse de l'habitation Pécoul[1] » (domaine classé monument historique depuis 1981).

La fortune de son père, commerçant, lui donne accès à des études supérieures à Paris au lycée Louis-le-Grand — où il côtoie Charles Péguy[2] — puis à la faculté de droit de Paris. En 1898, il s'inscrit au barreau et devient avocat. En 1902-1903, il est chef adjoint du cabinet d'Ernest Vallé au ministère de la Justice[3]. Mais un drame marque cette période : le , il perd toute sa famille au cours de l'éruption de la montagne Pelée, en Martinique.

Parcours politique[modifier | modifier le code]

Candidat aux élections législatives de 1906 dans la première circonscription de la Martinique, Henry Lémery est battu au premier tour par Osman Duquesnay. En 1909, c'est à Paris qu'il brigue un mandat parlementaire, à la faveur d'une élection partielle. Lors des élections législatives de 1914, il se porte à nouveau candidat en Martinique, où il est élu député au premier tour avec 67,7 % des suffrages. Il est battu lors du scrutin de 1919 par Joseph Lagrosillière[2].

Bien qu'ayant été exempté de conscription de par son origine coloniale, il s'engage comme soldat dès la déclaration de guerre en 1914 et se démarque en Champagne, à Verdun et dans la Somme[3]. De retour au Parlement, il est nommé sous-secrétaire d'État aux Transports maritimes et à la Marine marchande le , au sein du second gouvernement Clemenceau. Il est le premier originaire de l'Outre-mer à être nommé dans un gouvernement français. Le , il quitte le gouvernement contre l'avis de Georges Clemenceau, qui souhaitait le nommer ministre des Stocks[3].

Élu sénateur de la Martinique en 1920, il est battu lors des élections sénatoriales de 1924 mais fait son retour au Sénat à la suite de l'annulation de l'élection de son adversaire, Fernand Clerc[3]. Il siège d'abord dans le groupe de la Gauche démocratique avant de le quitter pour devenir indépendant[4]. Partisan de l'assimilation de la Martinique à la France, le , Henry Lémery propose au Sénat une loi visant au classement des colonies antillaises en départements français.

Henry Lémery est nommé garde des Sceaux par Gaston Doumergue le [5]. Il occupe cette fonction 24 jours, jusqu'à la fin du gouvernement, le suivant. En 1938, il fonde une association anticommuniste, la Société des Amis de la Russie nationale[6], en compagnie du journaliste franco-russe Arsène de Goulevitch (dit François de Romainville).

Henry Lémery en 1940.

Sous le régime de Vichy, Henry Lémery est brièvement ministre-secrétaire d’État aux Colonies du gouvernement Laval (du au )[7]. Il étend aux colonies les lois des 13 et , interdisant les sociétés secrètes et les réunions spontanées des conseils généraux[8]. Apprenant qu'Hitler aurait, à son sujet, dit que la France était en train de se « négrifier », il lui écrit : « Non, monsieur Hitler, c'est l'Afrique qui est en train de se franciser[9]. » Toutefois, la citation est probablement apocryphe car l'allusion au Vernegerung date de Mein Kampf. Germanophobe, il reste l'une des personnes les plus proches du maréchal Pétain, qu'il a connu dans des gouvernements précédents, mais est écarté du gouvernement de Pierre Laval, probablement en raison de sa mésentente avec Paul Baudouin[10] mais pas pour des motifs racistes, contrairement à ce qui est souvent affirmé[11]. Son mandat de sénateur expire officiellement le [12], mais il ne l’est plus de facto après l’arrivée au pouvoir du maréchal Pétain, qui ne réunit pas une seule fois le Parlement durant toute l’Occupation[b].

Arrêté et emprisonné à la prison de Fresnes pour son soutien au régime de Vichy, mais libéré peu de temps après, il est acquitté par la Haute Cour de justice en 1947 pour faits de résistance[14]. Il fait ensuite partie de l'Association pour défendre la mémoire du maréchal Pétain (ADMP).

Fin de vie et mort[modifier | modifier le code]

En 1965, âgé de 90 ans et retiré de la vie politique, il comparaît devant le tribunal correctionnel pour offense au chef de l'État, le général de Gaulle, dans son livre D'une république à l'autre, paru l'année précédente[7].

Henry Lémery meurt le à son domicile du 7e arrondissement de Paris, à l'âge de 97 ans[2].

Détail des mandats et fonctions[modifier | modifier le code]

Le gouvernement Laval V autour du maréchal Pétain : Henry Lémery est avant-dernier au premier rang.

Au gouvernement[modifier | modifier le code]

  •  : ministre-secrétaire d’État aux Colonies (gouvernement Laval V).
  •  : garde des Sceaux, ministre de la Justice (gouvernement Doumergue II).
  •  : sous-secrétaire d’État aux Transports maritimes et à la Marine marchande (gouvernement Clemenceau II).

Au Parlement[modifier | modifier le code]

  • [b] : sénateur de la Martinique.
  •  : sénateur de la Martinique.
  •  : député de la première circonscription de la Martinique.

Synthèse des résultats électoraux[modifier | modifier le code]

Sauf précision contraire, les résultats ci-dessous proviennent du Journal officiel de la Martinique[15].

Élections législatives[modifier | modifier le code]

Date Circonscription Voix % Issue
1906 1re de la Martinique 4 968 47,9 Battu
1909 [16] 2e du 12e arr. de Paris 8 0,1 Battu
1914 [17] 1re de la Martinique 6 868 67,7 Élu
1919 Martinique[c] 7 867 25,0 Ballottage
13 499 20,6 Battu

Élections sénatoriales[modifier | modifier le code]

Date Circonscription Voix % Issue
1920 [18] Martinique 196 63,8 Élu
1924 135 49,8 Battu
147 54,4 Élu
1932 155 52,2 Élu

Décorations[modifier | modifier le code]

Publications[modifier | modifier le code]

  • De la guerre totale à la paix mutilée, Alcan, 1931.
  • La Révolution française à la Martinique, Larose, 1936.
  • La Justice du Frente popular en Espagne, Éditions de France, 1937.
  • La Tragédie espagnole, ACIP, 1938.
  • La Russie et la France, Amis de la Russie nationale, 1938.
  • L'Heure de la Russie nationale, Amis de la Russie nationale, 1940.
  • De la paix de Briand à la guerre de Hitler, Vigneau, 1949.
  • D'une république à l'autre : Souvenirs de la mêlée politique 1894-1944, La Table Ronde, 1964.

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Parfois orthographié Henri Lémery.
  2. a et b De facto, puisque durant la période de l'Occupation, le Parlement n'est pas dissous, mais le Sénat et la Chambre des députés sont « ajournés jusqu'à nouvel ordre », seul le chef de l'État pouvant les réunir. Le Parlement ne se réunit plus durant toute l'Occupation, entérinant dans les faits le caractère autoritaire du régime de Vichy[13].
  3. Circonscription unique.

Références[modifier | modifier le code]

  1. J.-C. W., « LÉMERY Henry », dans Jack Corzany (dir.), Dictionnaire encyclopédique Désormeaux, Fort-de-France, Désormeaux, , t. 5 p. 1560-1561.
  2. a b et c « M. Henri Lemery est mort », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  3. a b c et d « Henry Lémery », dans le Dictionnaire des parlementaires français (1889-1940), sous la direction de Jean Jolly, PUF, 1960 [détail de l’édition].
  4. Henry Lémery, « Souvenirs politiques d'un nonagénaire », Écrits de Paris,‎ , p. 48-53.
  5. Dominique Chathuant, « L'émergence d'une élite politique noire dans la France du premier 20e siècle ? », Vingtième Siècle : Revue d'histoire, no 101,‎ , p. 133-147 (lire en ligne).
  6. « Journal des débats politiques et littéraires », sur gallica.bnf.fr, (consulté le ).
  7. a et b « Henry Lémery », La Documentation française, Dictionnaire des parlementaires français (1940-1958), 1988-2005 [détail des éditions].
  8. Eric T. Jennings, Vichy sous les tropiques : La Révolution nationale à Madagascar, en Guadeloupe, en Indochine, 1940-1944, Paris, Grasset, , 386 p. (ISBN 2-246-65371-1).
  9. Cité in Raymond Tournoux, Pétain et la France, Plon, 1980, p. 35.
  10. Raymond Tournoux, Pétain et la France, op. cit., p. 192 n.
  11. Axel Gyldén, « Les Antilles de 1940 à 1944 : Vichy vaincu par la pression populaire », L'Express,‎ (lire en ligne).
  12. « LEMERY Henry », sur senat.fr (consulté le ).
  13. « Acte constitutionnel no 3 du 11 juillet 1940 », sur mjp.univ-perp.fr (consulté le ).
  14. Dominique et Michèle Frémy, Quid 98, p. 680 b.
  15. « Journal officiel de la Martinique (1902) », sur gallica.bnf.fr (consulté le ).
  16. « Bulletin municipal officiel de la Ville de Paris », sur gallica.bnf.fr, (consulté le ).
  17. « Résultats électoraux des élections législatives des 26 avril et 10 mai 1914 » [PDF], sur archives.assemblee-nationale.fr (consulté le ).
  18. « Séance du 22 janvier 1920 » [PDF], sur senat.fr (consulté le ).
  19. a b et c « Henry LÉMERY », sur laconference.net (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]