Ettringite

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Ettringite
Catégorie VII : sulfates, sélénates, tellurates, chromates, molybdates, tungstates[1]
Image illustrative de l’article Ettringite
Ettringite - N'Chwaning Mines, Cap-du-Nord, Afrique du Sud
Général
Classe de Strunz
Classe de Dana
Formule chimique Ca6Al2(SO4)3(OH)12
·26H2O
Identification
Masse formulaire 1 255,107 uma
Couleur blanche, jaune brillant, parfois incolore
Système cristallin Trigonal
Réseau de Bravais Primitif P
Classe cristalline et groupe d'espace Dihexagonal dipyramidal
P 63/mmc
Clivage mauvais
Habitus Hexagonal, bipyramidal, prismatique, fibreux, tonnelet, agrégat, radié.
Échelle de Mohs 2 – 2,5
Trait blanc
Éclat vitreux
Propriétés optiques
Indice de réfraction no=1,491
ne=1,470
Biréfringence Δ=0,021 ; uniaxe négatif
Fluorescence ultraviolet Aucune
Transparence transparente à translucide
Propriétés chimiques
Densité 1,70
Solubilité Soluble dans HCl dilué, dans HNO3 dilué, décomposé partiellement par l’eau froide
Propriétés physiques
Magnétisme aucun
Radioactivité aucune

Unités du SI & CNTP, sauf indication contraire.

L’ettringite est une espèce minérale, composée de sulfate de calcium et d'aluminium hydraté, de formule : Ca6Al2(SO4)3(OH)12·26H2O, encore notée en formule oxyde : 3CaO·Al2O3·3CaSO4·32H2O.

Inventeur et étymologie[modifier | modifier le code]

Décrite par Lehmann en 1874[2]. Inspirée du nom de sa localité-type Ettringen[3].

Synonymes[modifier | modifier le code]

Certains ouvrages de génie civil, ou de technique du bâtiment, mentionnent aussi sous l'appellation de "sel de Candlot"[4],[5], parfois improprement orthographiée "sels de Candelot"[6], l'ettringite produite par la réaction des sulfates et des liants hydrauliques comme le ciment en cas de contamination des bétons ou des mortiers par du plâtre ou du gypse. En présence d'humidité, des gonflements importants peuvent alors se développer dans ces matériaux de construction et causer des désordres structuraux considérables[4],[5],[6].

Le nom de "sel de Candlot"[5] a été donné au trisulfatealuminate tricalcique hydraté en hommage à l'ingénieur chimiste français Édouard Candlot (1858 – 1922) qui l'a découvert dans les produits d'hydratation du ciment Portland. Édouard Candlot a également promu l'ajout de gypse au clinker avant de le broyer pour en faire du ciment afin de ralentir la vitesse d'hydratation du tricalcium aluminate (3CaO·Al2O3, ou C3A en notation cimentière), la phase minérale la plus réactive (et la plus exothermique) du clinker, responsable de la prise trop rapide et indésirable du béton et des mortiers.

Topotype[modifier | modifier le code]

Ettringer Bellerberg (en), Ettringen, Mayen, Eifel, Rhénanie-Palatinat. Allemagne.

Cristallographie[modifier | modifier le code]

  • Paramètres de la maille conventionnelle : a = 22,46 Å, c = 21,44 Å, Z = 8 ; V = 9 366,45 Å3
  • Densité calculée = 1,78

Cristallochimie[modifier | modifier le code]

  • Elle forme une série avec la thaumasite.
  • Elle sert de chef de file à un groupe de minéraux isostructuraux qui porte son nom.

Groupe de l'ettringite[modifier | modifier le code]

  • Carraraïte : Ca3Ge(OH)6(SO4)(CO3)·12H2O
    (P 63/m ou P 63 Hex)
  • Charlésite : Ca6(Al,Si)2(SO4)2[B(OH)4](OH,O)12·26H2O
    (P 31c 3m)
  • Ettringite : Ca6Al2(SO4)3(OH)12·26H2O
    (P 63/mmc)
  • Jouravskite : Ca3Mn(SO4,CO3)2(OH)6·12H2O
    (P 63/m 6/m)
  • Sturmanite : Ca6(Fe,Al,Mn)2(SO4)2[B(OH)4](OH)12·25H2O
    (P 31c 3m)
  • Thaumasite : Ca3[Si(OH)6](CO3)(SO4)·12H2O
    (P 63/m 6/m)

Gîtologie[modifier | modifier le code]

Minéral d’environnement carbonaté. Dans les géodes au sein d’enclaves de calcaire métamorphique des laves à néphéline. Dans les calcaires métasomatisés.

Certaines ettringites ont une origine biominérale et peuvent participer aux phénomènes de biocicatrisation de certains mortiers dus à des « bactéries cimentières » dont par exemple Bacillus pseudofirmus[7].

Minéraux associés[modifier | modifier le code]

Synonymie[modifier | modifier le code]

  • chalkomorphit (Vom Rath, G. 1873)[8]
  • woodfordite[9]

Gisements remarquables[modifier | modifier le code]

En France :

Dans le monde :

Utilité[modifier | modifier le code]

Il s'agit d'un hydrate du ciment Portland et surtout des phases alumineuses que l'on peut rencontrer dans certains ciments spéciaux. On distingue majoritairement deux produits d'hydratation :

  • La phase principale aluminate ferrite trisubstituée notée AFt, c'est l'ettringite proprement dite. Sa formule chimique est soit en notation cimentière . Elle forme des aiguilles principalement hexagonales de longueurs variables en fonction des conditions d'hydratation (jusqu'à plusieurs dizaines de microns) ;
  • Le sous-produit d'hydratation est un monosulfoaluminate de calcium hydraté (phase aluminate ferrite monosubstituée, notée AFm) dont la formule est soit en notation cimentière . Il forme des plaques hexagonales.

L'ettringite peut provoquer un gonflement pathogène si elle se forme après la prise du ciment (réaction sulfate interne (RSI) ou externe (RSE) suivant l'origine des ions sulfates). C'est ce qu'on appelle la formation d'ettringite secondaire ou différée. Elle est présente dans les ouvrages à base de ciment Portland qui subissent des hausses de température, ou des traitements thermiques, à des températures supérieures à 65 °C[15],[16],[17].

Sa structure microscopique en aiguilles enchevêtrées confère aux matériaux cimentaires qui contiennent de l'ettringite primaire des propriétés mécaniques intéressantes[18]. En revanche, la lente croissance cristalline de ces aiguilles au sein des pores d'une matrice de béton durci est capable d'exercer d'énormes pressions de cristallisation et d'engendrer des gonflements catastrophiques pour la stabilité des structures en béton exposées à l'eau et à l'humidité (barrages et piles de pont immergées). C'est la conséquence de la formation d'ettringite différée (en anglais : delayed ettringite formation, DEF), lorsque les phases AFm, formées de façon préférentielle lors de l'échauffement du béton au-dessus de 65 °C, recristallisent lentement à température ambiante en AFt (ettringite) durant les mois et les années qui suivent la construction des ouvrages massifs.

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Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. La classification des minéraux choisie est celle de Strunz, à l'exception des polymorphes de la silice, qui sont classés parmi les silicates.
  2. "Über den Ettringit, ein neues Mineral in Kalkeinschlüssen der Lava von Ettringen (Laacher Gebiet)", N. Jb. Mineral. Geol. Paläont., 273-275.
  3. MINER Database von Jacques Lapaire - Minéraux et étymologie
  4. a et b Editions Eyrolles, « Candlot (sel de) – Dictionnaire professionnel du bâtiment travaux public (BTP) – Eyrolles », sur editions-eyrolles.com (consulté le ) : « Définition du mot : Candlot (sel de) – n.m. : [Mat.], voir Ettringite. »
  5. a b et c Philippe Souchu, « Les sulfates et les mortiers », sur Site documentaire du Lerm, (consulté le ) : « C3A + 3(CaSO4·2H2O) + 26H2O = C3A·3CaSO4·32H2O (ettringite ou trisulfatealuminate tricalcique hydrate ou encore sel de Candlot). »
  6. a et b Cresson Rolland, « Glossaire – Définitions. Peinture et revêtements connexes – Règles d'exécution des travaux (Réf : C3691 v3) », sur Techniques de l'Ingénieur, (consulté le ) : « Ettringite dit « sels de Candelot ». Composé qui se forme lorsque plâtre et liant hydraulique sont mélangés. Les sels gonflent en présence d'humidité jusqu'à éclatement de la maçonnerie. »
  7. Ducasse-Lapeyrusse, J., Gagné, R., Lors, C., & Damidot, D. (2014). Traitement de mortiers fissurés par biocicatrisation : vers une évaluation quantitative de l’efficacité bactérienne. Matériaux & Techniques, 102(1), 105 (résumé)
  8. Vom Rath, G. (1873). Über ein neues Mineral (Chalkomorphit) auf einem Einschluß in der Lava von Niedermendig, Annalen der Chemie und Physik, Ergänzungsband VI, 376–378.
  9. Murdoch, Joseph & Chalmers, Robert A. (1958). Woodfordite, a new mineral from Crestmore, California (abstract). Geol. Soc. Amer. Bull. 69: 1620–1621.
  10. Grünhagen H. and Mergoil J. (1963). Bull. Soc. Franç. Minér. Crist., LXXXVI, p. 149–157.
  11. Eytier J.R., Eytier Ch., Favreau G., Devouard B., Vigier J. (2004). Minéraux de pyrométamorphisme de Lapanouse-de Sévérac (Aveyron). Cahier des Micromonteurs 85: 3–58.
  12. Hentschel, G., Dent Glasser, L.S., Lee, C.K. (1983). Jasmundite. Ca22(SiO4)8O4S2, a new mineral. Neues Jahrbuch Mineralogie, Monatshefte.
  13. Russo, M. & Punzo, I. (2004). I minerali del Somma-Vesuvio. AMI Associazione Micro-mineralogica Italiana, Ed., Cremona, 317 pp.
  14. Hochleitner, R. (1986). Minerals of South Africa. Sturmanit und Ettringit aus den Kalahari-Manganfeldern. LAPIS 11 (10), 19–24.
  15. Source : Laboratoire Central des Ponts et Chaussées (LCPC), actuellement IFSTTAR.
  16. Loïc Divet, « Etat des connaissances sur les causes possibles des réactions sulfatiques internes au béton », Bulletin de Liaison des Laboratoires des Ponts et Chaussées, no 227,‎ , p. 71–84 (lire en ligne)
  17. Bruno Godart (2009). Méthodes de suivi dimensionnel et de suivi de la fissuration des structures : Avec application aux structures atteintes de réaction de gonflement interne du béton : Guide technique IFSTTAR. Laboratoire Central des Ponts et Chaussees (LCPC), 60 p. ⟨https://10.3829/gt-gtsuividim-fr⟩. ⟨hal-00457944⟩.
  18. Odler, I. (2000). Special inorganic cements, Benur, A. & Mindess, S. (ed.), Taylor & Francis.