Acide tranexamique

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
(Redirigé depuis C8H15NO2)

Acide tranexamique
Image illustrative de l’article Acide tranexamique
structure de l'acide tranexamique trans
Identification
Nom UICPA acide 4-(méthylamino)cyclohexanecarboxylique
No CAS 1197-18-8
No ECHA 100.013.471
No CE 214-818-2
Code ATC B02AA02
PubChem 5526, 1549136
SMILES
InChI
Propriétés chimiques
Formule C8H15NO2  [Isomères]
Masse molaire[1] 157,210 2 ± 0,008 3 g/mol
C 61,12 %, H 9,62 %, N 8,91 %, O 20,35 %,
Propriétés physiques
fusion >300 °C
Solubilité 1g/6ml (eau)
Précautions
Directive 67/548/EEC
Irritant
Xi



Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.

L’acide tranexamique est un dérivé synthétique de la lysine utilisé en médecine. Cette molécule se retrouve dans les médicaments Lysteda, Cyklokapron (États-Unis), Transamin ou Transcam en Asie, Espercil en Amérique du Sud et Exacyl ou Spotof en Europe. La prescription de ces médicaments se fait en cas de saignement excessif, en visant une inhibition du système fibrinolyse. Le mécanisme d’action de l'acide tranexamique repose sur un blocage de la formation de plasmine, par inhibition de l’activité protéolytique des activateurs du plasminogène ; il en résulte en dernier lieu une inhibition de la dissolution du caillot (fibrinolyse). Il est donc décrit comme un antifibrinolytique (inhibiteur de la fibrinolyse).

Origine et fabrication[modifier | modifier le code]

L’acide tranexamique est une substance de synthèse, qui ressemble à la lysine.

Son activité antifibrinolytique a été découverte dans les années 1950[2].

Chimie[modifier | modifier le code]

L’acide tranexamique consiste en une fonction acide carboxylique et une fonction aminométhyl branchées en 1,4 (para) sur un cyclohexane. Les deux atomes de carbone du cycle portant ces fonctions ne sont pas chiraux car la disposition para des deux fonctions chimiques fait que chacun de ces deux atomes de carbone voit deux de ses substituants identiques. L’acide tranexamique n'a que deux stéréoisomères : le cis qui possède les deux fonctions du même côté du cycle (les deux fonctions dans deux positions opposées, axiale/équatoriale, et donc nommé aussi (s,s)-acide tranexamique) et l'isomère trans représenté sur la figure à droite (les deux fonctions de part et d'autre du cycle, soit les deux en position axiale ou équatoriale et donc nommé aussi (r,r)-acide tranexamique).

Mécanisme d’action[modifier | modifier le code]

L’acide tranexamique bloque la fixation du résidu lysine de la fibrine par la plasmine, l’enzyme responsable de la fibrinolyse. L’action normale de la plasmine, à savoir dissoudre le caillot (fibrinolyse) est ainsi bloquée. À faible dose, l’acide tranexamique agit comme un inhibiteur compétitif de la plasmine, et à dose élevée comme inhibiteur non compétitif.

Pharmacocinétique[modifier | modifier le code]

La biodisponibilité de l’acide tranexamique s’élève à 30-50 % après administration orale. Le volume de distribution est de 9-12 L. La demi-vie s’élève à 2 heures.

L’acide tranexamique n’est que très légèrement métabolisé dans le foie. Les métabolites retrouvés dans l’urine sont l’acide carboxylique (1 % de la dose administrée) et la forme acétylée de l’acide tranexamique (0,1 % de la dose administrée).

Il est excrété à 95 % par les reins et les voies urinaires (élimination par voie rénale).

Interactions médicamenteuses[modifier | modifier le code]

En cas d’administration concomitante d’acide tranexamique et de facteur IX, on observe un risque de thrombose élevé.

Efficacité[modifier | modifier le code]

Il n'existe pas de preuve convaincante de son efficacité lors des actes chirurgicaux[3]. Par contre, il diminue significativement les saignements et la mortalité consécutive à ces derniers au cours de traumatismes[4] à condition que son administration soit précoce. Si cette dernière est tardive, son utilisation peut être délétère[5].

Il permet de limiter les pertes sanguines postopératoires lors d'une chirurgie orthopédique, sans majoration du risque thromboembolique dans le cadre d’une prophylaxie concomitante par anticoagulant oral[6].

Indications[modifier | modifier le code]

  • Extractions dentaires ou hémorragies gingivales en cas d’hémophilie, pour empêcher ou diminuer les hémorragies.
  • Hyperfibrinolyse généralisée et / ou locale : diminution de l’hyperfibrinolyse provoquée soit par l’excédent de plasmine (hyperplasminémie), soit par suite d’un traitement thrombolytique, par exemple par la streptokinase. Une fibrinolyse locale accrue est susceptible de se manifester à la suite d’une opération de la prostate et d’interventions au niveau des voies urinaires, en cas d’hémorragies récidivantes au niveau du tractus gastro-intestinal, de colite ulcéreuse, d’hyperménorrhée essentielle ou causée par un dispositif intra-utérin DIU (règles plus abondantes), d’hémorragie nasale ainsi qu’après des extractions dentaires chez les patients montrant des troubles de la coagulation (coagulopathie).
  • Antidote pour les fibrinolytiques. L’acide tranexamique est encore utilisé comme antidote en cas d’inhibition des fibrinolytiques tels que la streptokinase. Alternativement, on donne dans ce cas aussi l’inhibiteur de la protéinase (antiplasmine) Aprotinine (en) (Trasylol).
  • Angio-œdème héréditaire (AOH).
  • Polytraumatisé : administré précocement, l'acide tranexamique réduit les besoins transfusionnels par son action sur la coagulopathie liée à la transfusion massive [7].

Effets indésirables[modifier | modifier le code]

  • Réactions allergiques : celles-ci surviennent tant au niveau systémique (sur tout le corps) que sous forme d’éruptions cutanées.
  • Formation de thrombose : l'acide tranexamique peut notamment chez les patients présentant une tendance congénitale ou acquise aux thromboses (thrombophilie) entraîner la formation ou l’accroissement des thromboses. Les thromboses peuvent ensuite provoquer des embolies (embolie pulmonaire, accident vasculaire cérébral).
  • Risque d’accident vasculaire majoré en cas de fibrillation auriculaire.
  • Troubles visuels. Dans les essais animaux, des lésions de la rétine ont été observées.

Il semble exister une discrète augmentation des accidents neurologiques[8] ou du risque de convulsions[9] après certaines interventions.

Contre-indications[modifier | modifier le code]

  • Allaitement, l'acide tranexamique passe dans le lait maternel (à très faibles concentrations).
  • les hémorragies des voies urinaires, en raison des risques d'obstructions de l’uretère avec rétention urinaire consécutive.
  • Présence de thromboses, l’administration d’acide tranexamique favorisant les thromboses (préexistantes).
  • Maladie infectieuse avec coagulation intravasculaire disséminée.

Composition et formes d’administration[modifier | modifier le code]

  • 1 comprimé pelliculé contient 500 mg d’acide tranexamique.
  • 1 ampoule de 5 ml contient 500 mg d’acide tranexamique.

Divers[modifier | modifier le code]

L'acide tranexamique fait partie de la liste des médicaments essentiels de l'Organisation mondiale de la santé (liste mise à jour en )[10].

Liens externes[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  2. Okamoto, Shosuke; Hijikata-Okunomiya, Akiko; Wanaka, Keiko; Okada, Yoshio; Okamoto, Utako; Enzyme controlling medicines: introduction, Seminars in Thrombosis and Hemostasis, 1997;23:493-501
  3. Ker, Katharine; Roberts, Ian; Shakur, Haleema; Coats, Tim J.; Antifibrinolytic drugs for acute traumatic injury, Cochrane Database of Systematic Reviews, 2004;4.CD004896
  4. CRASH-2 trial collaborators. Effects of tranexamic acid on death, vascular occlusive events, and blood transfusion in trauma patients with significant haemorrhage (CRASH-2): a randomised, placebo-controlled trial, Lancet, 2010;376:23-32
  5. The CRASH-2 collaborators. The importance of early treatment with tranexamic acid in bleeding trauma patients: an exploratory analysis of the CRASH-2 randomised controlled trial, Lancet, 2011;377:1096-1101
  6. Clavé, Arnaud, Fazilleau, François, Dumser, Didier et Lacroix, Jérôme, « Efficacité de l’acide tranexamique sur la perte sanguine postopératoire après prothèse totale de hanche sans ciment de première intention dans le cadre d’une prophylaxie thromboembolique par rivaoxaban : une étude de 70 patients en « cas–témoin » ☆ », Revue de Chirurgie Orthopédique et Traumatologique, vol. 98, no 5,‎ , p. 426-433 (lire en ligne)
  7. Schöchl, Herbert; Maegele, Marc; Solomon, Cristina; Görlinger, Klaus; Voelckel, Wolfgang; Early and individualized goal-directed therapy for trauma-induced coagulopathy, Scandinavian Journal of Trauma, Resuscitation and Emergency Medicine, 2012, 20:15 (24 février 2012)
  8. Ngaage, Dumbor L.; Bland, John Martin; Lessons from aprotinin: is the routine use and inconsistent dosing of tranexamic acid prudent? Meta-analysis of randomised and large matched observational studies, European Journal of Cardio-thoracic Surgery, 2010;37:1375-1383
  9. Murkin, John M.; Falter, Florian; Granton, Jeff; Young, Bryan; Burt, Christiana; Chu, Michael; High-dose tranexamic acid is associated with nonischemic clinical seizures in cardiac surgical patients, Anesthesia & Analgesia, 2010;110:350-353
  10. WHO Model List of Essential Medicines, 18th list, avril 2013