Alexis Kagame

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Alexis Kagame
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L'abbé Alexis Kagamé, né le à Kiyanza (Rwanda) et mort le [1], est un prêtre catholique rwandais, poète, philosophe, essayiste, linguiste, historien, professeur d'université et chercheur de renommée internationale.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse et études[modifier | modifier le code]

Alexis Kagame est né à Kiyanza près de Remera y'Abaforongo, dans l'ancienne préfecture de Kigali au Rwanda. Il est du lignage des Abahabwa du clan Abasinga. Sa famille aurait immigré au Rwanda en provenance du Ndorwa (situé au nord de l'actuelle province de Byumba), probablement vers la fin du XIXe - début XXe siècle[2].

Le jour de sa naissance, les colons allemands tuèrent l'umutwa nommé Basebya. Ce dernier et son compère umututsi, Ndungutse, entendaient résister à l'autorité du roi Musinga et des colons allemands. Ainsi donc le père Bitahurwina donna à son fils le nom de « Basebya » en l’honneur de cet umutwa résistant. Plus tard, ce nom sera utilisé pour signer l’un de ses articles[3]. Le nom faisant honte à l’entourage et surtout à sa mère qui ne tolérait pas que son enfant portât le nom d’un umutwa, fût-il un héros, son père l’appela Bagirishya, nom qu’il abandonnera lui-même plus tard pour se nommer Kagame.

À l’âge de 12 ans, il s’inscrit au catéchuménat de Nganzo, dans la chefferie du Kibari, dans l'ancienne préfecture de Ruhengeri. Sans avoir fait d’école primaire, c’est sur le tard, à l’âge de 15 ans, en 1927, qu’il est admis à l’école officielle pour les Chefs à Ruhengeri. Il est baptisé le à la mission de Rwaza. Il entre, quelques jours plus tard, au Petit Séminaire Saint Léon de Kabgayi où il se révèle comme un véritable génie. Il finit ses études secondaires en 1933 et s’inscrit au Grand Séminaire à Kabgayi pour suivre ses études de philosophie et de théologie.

En 1938-1939, il fait son année de probation (sorte de stage où les futurs prêtres sont envoyés dans les paroisses) en tant que professeur de français au Noviciat des Frères Joséphites à Kabgayi. Pendant la même année, il est rédacteur en chef du journal Kinyamateka où il publie ses premiers essais littéraires. En effet, à partir de 1936, ses supérieurs au Grand Séminaire l’autorisent à consacrer ses loisirs à des recherches dans le domaine de l’histoire et de la littérature. Pendant la même année, l'un des prêtres qui enseigne au séminaire demande aux élèves de faire une présentation sur leurs projets d'études devant une audience qui compte le roi Mutara III Rudahigwa. À la fin de l'audience, le roi réclame Kagame et le questionne sur les sources de son savoir. Kagame lui répond « Je l'ai appris de Sekamana et deux autres conteurs ». Et le Roi de répliquer « Je les connais ceux-là, mais ils ne sont pas les plus cultivés. Je vais t'envoyer les meilleurs pour que toi aussi tu l'apprennes ». C’est ainsi qu’il découvre la poésie guerrière et dynastique du Rwanda et peut consigner par écrit le trésor oral de la culture et de l’histoire du Rwanda.

Alexis Kagame est ordonné prêtre le . En septembre 1952, Alexis Kagame est envoyé à Rome pour poursuivre ses études supérieures. En 1955, il obtient son doctorat de philosophie après soutenance de sa thèse La philosophie bantu-rwandaise de l’être[4]. En plus de sa charge pastorale, il se consacre dès lors à l’écriture, à l’enseignement et à la recherche. Il a écrit plusieurs ouvrages et des centaines d'articles.

Alexis Kagame est l'oncle issu de germain de Landoald Ndasingwa et de sa sœur Louise Mushikiwabo.

Parcours professionnel[modifier | modifier le code]

Alexis Kagame commence sa carrière en 1938 en tant que professeur de français au noviciat des Frères Joséphites de Kabgayi et rédacteur du journal Kinyamateka où il publie ses premiers essais littéraires pendant son année de probation[5],[6]. Après son ordination en 1941, il exerce son ministère pastoral, pendant quelques mois, à la mission de Muramba dans l'ancienne préfecture de Gisenyi. Il est ensuite nommé rédacteur en chef puis, en 1950, directeur du journal catholique Kinyamateka. En mai 1947, il est nommé à la mission de Gisagara et devient en octobre 1950 directeur du journal Kinyamateka.

De 1952 à 1955, il poursuit ses études à l’Université pontificale grégorienne de Rome, d’où il sort muni d’un doctorat en philosophie. Il devient alors professeur d’histoire et de philosophie au groupe scolaire de Butare, professeur de littérature rwandaise au Petit Séminaire de Kansi, professeur à l’Institut catéchétique africain à Butare.

De 1966 à 1973, il est recteur de Petit Séminaire de Kansi. Dès 1967, il est en même temps professeur d’histoire et de littérature rwandaise à l’Université nationale du Rwanda, professeur de kinyarwanda à l’Institut pédagogique national, professeur d’histoire de la philosophie au Grand Séminaire de Nyakibanda et dès 1971 professeur de cultures africaines dans la même institution. En 1972, il est professeur visiteur d’histoire de l’Afrique orientale à l’Université nationale du Zaïre (UNAZA) — campus de Lubumbashi.

À partir de 1973, il t fin à sa responsabilité de Recteur du Petit Séminaire de Kansi pour se consacrer entièrement à l’enseignement universitaire et à ses recherches. Le , lui est attribuée une médaille d'honneur en tant qu'officier de l'ordre national des Grands Lacs, médaille accordée aux Rwandais qui ont considérablement contribué à instruire leurs compatriotes à travers l'écriture, la poésie, le chant, etc.

Controverse[modifier | modifier le code]

Bien qu'il n'ait pas fait d'études pour devenir historien, il joua un rôle considérable dans l'historiographie du pays. Il a publié notamment une grande partie du patrimoine oral royal (consigné dans ses ouvrages) qui lui a été transmis par le collège des Abiru (détenteurs du code ésotérique royal) dont il faisait partie avant l'avènement de la République. C'est en partie grâce à ses travaux de conservation et de transcription que l'on peut aujourd'hui connaître ou étudier l'histoire du Rwanda.

Selon Claudine Vidal, le statut historiographique d’Alexis Kagame est cependant ambigu. À la suite des sévères critiques méthodologiques de Jan Vansina[7], de nombreux historiens ne le considèrent que comme un informateur, tandis que d’autres continuent à voir dans son œuvre le travail d’un historien. Pour Claudine Vidal toutefois, ces deux lectures négligent les intentions propres de Kagame et le caractère politiquement et philosophiquement engagé de son œuvre.

Honneurs et distinctions professionnelles[modifier | modifier le code]

  1. Membre du groupe des experts indépendants auprès du Conseil de l'Europe. Strasbourg, France. 1947 - 1962.
  2. Membre du conseil d'administration du Rwanda-Urundi. 1956.
  3. Membre du comité scientifique international pour la rédaction d'une Histoire générale de l'Afrique (UNESCO). 1970
  4. Décoré de l'ordre national des Grands Lacs. 1970
  5. Elevé à la dignité de prélat par Son Éminence le Pape. 1981
  6. Membre de l'Académie royale des sciences d'outre-mer (Bruxelles, Belgique).
  7. Membre des sciences d'outre-mer (Paris, France).
  8. Membre de l'association des Écrivains de la mer et de l'outre (Paris, France).
  9. Membre de l'Institut international africain(Londres, Grande-Bretagne).
  10. Membre de l'Institut international de Philosophie.
  11. Membre de l'Institut international des civilisation différentes.
  12. Chercheur associé de l'Institut national de recherche scientifique (Butare).
  13. Membre de droit permanent du groupe d'études et de recherches de linguistique.
  14. Prix de l'Institut national pour la préservation de la langue et de la culture (4 000 000 FRw).

Publications (Ouvrages)[modifier | modifier le code]

Histoire[modifier | modifier le code]

  1. Inganji Karinga, Karinga-le-triomphateur, t.1, Kabgayi, 1943, 106p. (2e édition en 1959)
  2. Inganji Karinga, Karinga-le-triomphateur, t.2. Kabgayi, 1947, 128p. (2e édition en 1959)
  3. Umwaduko w'Abazungu muri Afurika yo hagati - (L'arrivée des Européens en Afrique Centrale), Kabgayi, Editions Royales, 1947, 53p.
  4. Les organisations socio-familiales de l'ancien Rwanda, Bruxelles, Académie des Sciences Coloniales, 1954, 355p. [lire en ligne (page consultée le 12/08/2023)]
  5. Histoire du Rwanda, tome I, Leverville, Bibliothèque de l'Étoile, 1957, 27p.
  6. Histoire du Rwanda, tome II, Leverville, Bibliothèque de l'Étoile, 1958, 33p.
  7. Histoire du Rwanda, Leverville, Bibliothèque de l'Étoile, 1958, 61p.
  8. Le code des institutions politiques du Rwanda précolonial, 1952, 135 p. [lire en ligne (page consultée le 12/08/2023)]
  9. La notion de génération appliquée à la généalogie dynastique et à l'histoire du Rwanda des Xe - XIe siècles à nos jours, Bruxelles, Académie royale des sciences coloniales, 1959, 117p. [lire en ligne (page consultée le 12/08/2023)]
  10. L'histoire des armées bovines dans l'ancien Rwanda, Bruxelles, Académie royale des sciences d'Outre-Mer, 1961, 147p. [lire en ligne (page consultée le 12/08/2023)]
  11. Les milices du Rwanda précolonial, Bruxelles, Académie royale des sciences d'Outre-Mer, 1963, 196p. [lire en ligne (page consultée le 12/08/2023)]
  12. Le colonialisme face à la doctrine missionnaire à l'heure du Vatican II, Butare, 1963, 172p (texte polycopié).
  13. Un abrégé de l'ethno-histoire du Rwanda, Butare, Editions Universitaires du Rwanda, 1972, 286p.
  14. Un abrégé de l'histoire du Rwanda de 1853 à 1972, Butare, Editions Universitaires du Rwanda, 1975, 543p.

Linguistique[modifier | modifier le code]

  1. La langue du Rwanda et du Burundi expliquée aux autochtones, Kabgayi, 1960, 252p.
  2. Introduction à la conjugaison du verbe rwandais, Astrida, 1962. (texte polycopié).

Philosophie[modifier | modifier le code]

  1. La philosophie bantu-rwandaise de l'Être, Bruxelles, Académie royale des sciences coloniales, 1955.
  2. La philosophie bantu-rwandaise de l'Être, Bruxelles, Académie royale des sciences coloniales, 1956, 448p.
  3. La philosophie bantu comparée, Unesco, Présence africaine, 1976, 336p. (ISBN 2-7087-0331-5)

Création littéraire[modifier | modifier le code]

  1. Matabaro ajya Iburayi - Le voyage de Matabaro en Europe (publié par tranches dans le journal Ikinyamateka-tshy-Abana), Kabgayi, juin 1938-mars 1947.
  2. Icara nkumare irungu - Assieds toi que je te désennuie, Kabgayi, editions royales, 1947, 92p.
  3. Isoko y'amajyambere I - La source du progrès, Kabgayi, Editions Morales, 1949, 72p.
  4. Indyohesha-Birayi - Le relève-goût des pommes de terre, Kabgayi, Editions royales, 1949, 72p.
  5. Iyo Wiriwe nta rungu - Où tu as passé la journée point d'ennui, Kabgayi, Editions Royales, 1949, 232p.
  6. Isoko y'amajyambere II - La source du progrès II, Kabgayi, Editions Morales, 1950, 103p.
  7. Isoko y'amajyambere III - La source du progrès III, Kabgayi, Editions Morales, 1950, 103p.

Essais littéraires[modifier | modifier le code]

  1. La poésie dynastique au Rwanda, Bruxelles, Institut colonial belge, 240p. [lire en ligne (page consultée le 12/08/2023)]
  2. Imigani y'imigenurano, Kabgayi, Editions royales, 1953, 162p. (1722 proverbes).
  3. Introduction aux grands genres lyriques de l'ancien Rwanda, Butare, Editions Universitaires du Rwanda, 1979, 332p.

Religion[modifier | modifier le code]

  1. Umulirimbyi wa Nyili-Ibiremwa, Igitaramo cya mbere: Kuva iteka ritagize intangiriro, kugeza kw'itsindwa ry'amashitani, Astrida, Editions Morales, 1950, 75p.
  2. La Divine pastorale, Bruxelles, Editions du Marais, 1952, 109p.
  3. Umulirimbyi wa Nyili-Ibiremwa, Igitaramo cya kabiri: Immana irema byose mu minsi itandatu, Kabgayi: editions Morales, 1953, 64p.
  4. La Naissance de l'univers, Deuxième veillée du Chantre du Maître de la Création, Bruxelles, Editions du Marais, 1955, 85p.
  5. Dictionnaire en Kinyarwanda (traduction de textes liturgiques)
  6. Ijambo (traduction des épitres et des évangiles pour tous les dimanches et pour quelques fêtes), Kabgayi, 175p.
  7. Le Missel romain en kinyarwanda, Butare 1965.
  8. Amasomo ya za Misa zidasanganywe ayazo bwite. Imibyizi. 218p.
  9. Isezerano rishya ry'Umwami wacu Yezu Kristu - Le Nouveau Testament de Notre Seigneur Jésus-Christ, Kabgayi, 1971, 868p.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Eugène Shimamungu et al., Nyamunini, Dictionnaire bilingue et encyclopédique kinyarwanda-français, langue, histoire et culture, Lille, Editions Sources du Nil, , 1680 p. (ISBN 978-2-919201-40-2)
  2. Antoine Nyagahene, Histoire et peuplement : ethnies, clans et lignages dans le Rwanda ancien et contemporain, Lille, Atelier National de Reproduction des Thèses, , 708 p. (ISBN 978-2-7295-2187-5)
  3. Basebya, « Quelques éléments d'une philosophie de la compréhension mutuelle entre colonisateurs et colonisés. », Comprendre, Revue de la société européenne de culture,‎ 1960, venise.
  4. Alexis Kagame, La philosophie bantu-rwandaise de l'être, Bruxelles, Académie royale des sciences coloniales, , 448 p.
  5. Stage pour devenir prêtre
  6. Frédéric Rubwejanga, « Alexis Kagame, l'homme », Education, Science et Culture, Uburezi, Ubuhanga n'Umuco (n°spécial),‎ , p. 45-64
  7. Jan Vansina, Le Rwanda ancien : le Royaume nyiginya, Paris, Karthala, , 294 p. (ISBN 978-2-84586-145-9, lire en ligne)
  8. Education Science et Culture - Uburezi, Ubuhanga n'Umuco (Revue, n°Spécial), Alexis Kagame, l'homme et son oeuvre, Kigali, Rwanda, Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, , 320 p.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

(en) « Kagamé, Alexis », sur dacb.org (consulté le )

« HOMMAGE À UN GRAND INTELLECTUEL RWANDAIS ALEXIS KAGAME », sur Le site de la diaspora rwandaise (rwandaises.com) (consulté le )